Le projet de la Tour Triangle Porte de Versailles (XVe)
En ce début d’automne, le Sous-Directeur Général de l’UNESCO en charge du patrimoine mondial a émis de sérieuses réserves sur la politique menée par le Conseil de Paris concernant les immenses tours qui risquent d’encercler la capitale. Il souligne l’impact visuel qui sera durablement affecté alors que nous sommes une des rares villes de cette taille au « modèle 6 étages » encore préservée dans le monde. A ce titre d'uilleurs, les berges de la Seine sont classées au patrimoine mondial de l'UNESCO.
Pointant déjà la forte densité de Paris, il a égrainé un à un les inconvénients liés à ce type de construction souhaitée, notamment ceux liés à une forte consommation d’énergie.
Plusieurs chantiers sont déjà au stade de projet avancé.
Ainsi deux immeubles d’habitation de 50 m de haut sont en cours de construction dans le quartier Massena-Bruneseau (XIIe) près du périphérique et 4 tours de bureaux devraient à l'avenir les rejoindre. L' une d'entre elles atteindrait une hauteur de 180 m conséquence de la révision du PLU qui limitait à 37 m la hauteur des contructions depuis la polémique qui avait suivi la réalisation de la Tour Montparnasse (210 m).
L’ édification de la Tour Triangle est prévue à la Porte de Versailles (XVe). Son implantation fait débat. Le Commissaire Enquêteur n’a-t-il pas souligné les risques qui pèseront sur l’activité du Parc des Expositions dont l’emprise sera amputée de 7 000 m2, de même que les questions d’ombre dans les bureaux et l’afflux de 50 000 salariés dans un quartier où la circulation est particulièrement encombrée.
Quant à la tour prévue aux Batignolles (XVIIe) pour y installer dès 2017 le Palais de Justice, elle atteindra 160 m et sera construite en partenariat public-privé avec Bouygues.
Beaucoup estiment la formule de partenariat contestable, voire aberrante, puisque Bouygues paie la construction pour loue ensuite les locaux au Ministère de la Justice. Sans doute une bonne affaire pour l’opérateur.
D’autres pointent du doigt la modification à doses homéopathiques du PLU, via la procédure de révision simplifiée, quartier par quartier, ce qui permet d’esquiver un débat général qui aurait été bien nécessaire car des sondages révèlent que la majorité des parisiens sont contre les tours. Le débat sur ce sujet à l’occasion des élections municipales montre les différences de point de vue entre les candidats déjà déclarés. Certains y sont favorables et d’autres y sont opposés.
Il n’empêche et sans vouloir paraître ringard que Paris risque de perdre gros si les projets prévus arrivent à leur terme. Tout d’abord le quartier de La Défense ne manque pas de tours et Paris n'est donc pas exangue comme cela a été dit pourtant ! Est-il judicieux de gâcher le paysage unique de Paris si l’on voit poindre de n’importe quel endroit de la capitale, y compris le Marais historique, une cohorte de gratte-ciels comme les tours d’une citadelle ? Citadelle qui créera alors une rupture dans la perspective du Grand Paris pourtant souhaité et indisposera les parisiens à l'image du mur des fermiers généraux qui a coûté cher à ses instigateurs lors de la Révolution.
Les tours Duo de Jean Nouvel sur la Zac Paris Rive Gauche (XIIIe)
Il ne serait pas impossible que l’UNESCO, très critique à ce sujet, sorte Paris de sa liste des villes inscrites au patrimoine mondial de l’humanité. Paris risquerit alors de perdre très vite son statut de capitale la plus visitée au monde
A-t-on d'ailleurs aujourd’hui les moyens de se lancer dans des investissements aussi colossaux alors que le coût des grands chantiers tels celui des Halles ou celui de la salle de concert de la Vilette voient leur budget initial exploser et sont de plus en plus vivement critiqués ?
Dominique Feutry