Une façade et un portail qui portent les stigmates d'un "Vaisseau Fantôme"
C'est fin mars 2010 que nous avons commencé à vous raconter l'histoire de cet immeuble. Elle est intéressante car elle concentre un certain nombre de problématiques caractéristiques du Marais et de la politique logement de la Mairie de Paris. Et de celle du Maire du IIIe qui, pour être dans la ligne de l'Hôtel de Ville en la matière, n'en a pas pour autant ses propres singularités.
En effet, jusqu'à ce jour où nous continuons à vivre sous le régime du PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais de 1996, qui échappe totalement au PLU (plan local d'urbanisme) de Paris, il a exigé, non sans désinvolture car la loi n'était pas pour lui, mais avec élégance, que les candidats à la réhabilitation de biens immobiliers réservent le quart de la surfance rénovée au logement social.
Cette contrainte, à laquelle les intéressés se sont pliés d'assez bonne grace, a été respectée (îlot Charlot/Pastourelle, immeuble "aux arcades" Temple/Pastourelle, immeuble 108 rue Vieille du Temple, Hôtel du Grand Veneur rue de Turenne ...). On a relevé tout au plus quelques déconvenues dans des transactions relatives à l'immeuble de la rue Vieille du Temple.
Dans le cas présent, il s'agit d'un immeuble entier, apparemment libéré de toute occupation ; même les squatters, nous disent les voisins, ont disparu. La loi qui s'applique en matière d'urbanisme, en attendant que le PSMV ait été dûment révisé et soit entré en vigueur, laisse virtuellement la liberté aux propriétaires du traitement et de la destination de l'immeuble. Mais Pierre Aidenbaum, qui détient l'arme du permis de construire, s'y est intéressé dès 2010 et semblait avoir trouvé sur la question du logement social, un gentleman-agreement avec les propriétaires, empêtrés de surcroît à l'époque dans un conflit avec des occupants sans titres.
Trois ans après, l'état d'abandon du chantier pourrait faire penser que l'accord a fait long feu. Et pourtant ....
Pourtant la demande immobilière est forte dans nos quartiers, la rue est remarquablement calme et la vue des fenêtres de l'immeuble, sur la cour "à la romaine" de l'Hôtel d'Halwyll (Claude Nicolas Ledoux) est proprement remarquable.
Vue sur l'Hôtel d'Hallwyll, entrée 28 rue Michel le Comte (IIIe). Cliquez jusqu'à deux fois pour agrandir. C'est magique !
Contactés par nos soins, les propriétaires se veulent rassurants : les travaux se poursuivent, même s'ils ne sont pas visibles. Le rythme est lent car la crise rend leur financement difficile. Ils annoncent pourtant une livraison de l'immeuble rénové pour septembre 2013.
On en sait un peu plus sur la convention qu'Ils ont signée avec la Mairie de Paris. Elle porte sur 9 ans pendant lesquels ils s'engagent à louer une part significative de la surface à des bénéficiaires sociaux type PLUS, PLS et PLI proposés par la mairie. En contrepartie de cet engagement, ils recevront à la livraison une subvention compensatoire unique de la Ville de Paris, dont le montant ne nous a pas été révélé.
On découvre à cette occasion le caractère polymorphe - et pragmatique - de la politique de logement social de la Ville de Paris. Dans ce dossier, les bailleurs-sociaux traditionnels n'apparaissent pas. C'est le propriétaire privé qui joue ce rôle moyennant une contribution d'équilibre de la Ville, à la charge du contribuable. Il est juste de reconnaitre que dans cette affaire, le Maire du IIIe a obtenu ce qu'il voulait sans donner aux propriétaires le sentiment que c'était le fait du prince et qu'ils étaient spolliés. C'est ce qu'on appelle un accord "gagnant-gagnant". Le contribuable, quant à lui, a le sentiment du devoir accompli en matière de solidarité.
Il reste à vérifier si le chantier ne va pas trainer en longueur avec le risque, toujours présent, que l'immeuble se transforme de nouveau en squatt.
Gérard Simonet
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