Façade de l'église Saint-Gervais-Saint-Protais, place Saint-Gervais (IVe)
Gervais et Protais, deux frères martyrisés sous Néron ont connu un culte d’une grande ferveur au Moyen-Âge. Ils ont donné leur nom à de nombreuses églises dont celle, proche de l’Hôtel de Ville, bâtie sur une légère éminence, à l’emplacement d‘une basilique connue dès le IVème siècle. Commencée à la fin du XVème siècle (1494), la construction de l'église actuelle est achevée au cours la première moitié du XVIIème, soit 150 ans après le début des travaux.
La façade classique mais assez lourde fut terminée dès 1621, elle est l’œuvre de Salomon de Brosse, l'architecte à qui l'on doit la réalisation du Palais du Luxembourg et de Clément Métezeau. Elle est exceptionnelle non seulement par sa taille, mais aussi parce que les 3 ordres, dorique, ionique et corinthien s’y superposent. Les statues de Saint-Gervais et de Saint-Protais ont été placées au XIXe siècle. Très élevée, la nef est de style gothique flamboyant et donne un peu de majesté à la construction qui aurait inspiré François Mansart. Une remarquable clef de voûte de 2,50 m de diamètre orne la chapelle de la Vierge.
Détail du vitrail "La sagesse de Salomon" de Jean Chastellain (XVIème)
À l'intérieur, les nombreux vitraux impressionnent. Ceux du XVIe siècle sur la vie de la Vierge dus à Jean Chastellain figurent parmi les plus beaux. Mais d’autres ont été installés dans les chapelles au XVIIe, puis au XIXe et plus récemment au XXe siècle. Ces derniers sont de Sylvie Gaudin, artiste issue d'une grande famille de maitres-verriers. Ils traitent de la Nativité, de la Crucifixion ou la Résurrection. Parmi le mobilier, des belles stalles sculptées représentent des métiers. Des tableaux exceptionnels sont exposés notamment celui du "Martyre de Sainte Pétronille" signé du Guerchin. Dans une des chapelles, il est possible de voir le cénotaphe de Michel Le Tellier et les très belles statues de la famille du duc de Tresmes provenant du couvent des Célestins (couvent qui se trouvait dans le quartier de l’Arsenal). Les orgues, construites en 1601 et tenues pendant près de 170 ans par les Couperin, figurent sans doute parmi les plus anciennes de Paris (voir notre article du 27 novembre 2012). Scarron et Philippe de Champaigne sont inhumés dans cette église.
La nef particulièrement élevée
Entièrement restaurée au cours des dernières années, l’église présente aujourd’hui un aspect impeccable presque neuf lorsque l’on pénètre à l'intérieur. Pourtant elle a beaucoup souffert au cours de l’histoire. Dévastée à la Révolution puis remise en ordre au cours des décennies suivantes, elle a été le théâtre d’un drame à la fin de de la Première Guerre Mondiale. Un obus tiré par la fameuse et sinistre "grosse bertha" le Vendredi Saint de 1918, en plein office, tua 88 personnes et en blessa 68 autres. La restauration s’achévera 3 ans plus tard.
Détail du tombeau du duc de Tresmes
Deux détails méritent intérêt. L'un concerne un orme qui était planté devant l'église place Saint-Gervais où, selon une coutume médiévale, l'on procédait à des assemblées et des jugements. L'autre a trait à Voltaire qui a habité un temps juste en face de l'église.
Dominique Feutry