L'immeuble au n°12 de la rue Transnonain (*) en 1904
L'affaire a fait grand bruit à l'époque, amplifiée qu'elle fut par un dessin de Daumier devenu son œuvre de référence connue dans le monde entier.
La rue Transnonain a été en effet le théâtre d'un massacre qui a ébranlé le régime du roi Louis-Philippe puisque 12 personnes d'un même immeuble furent tuées par l'armée, sans compter les nombreux blessés...
Quelle a été le déroulement de cette malheureuse affaire ?
La rue Transnonain correspondait autrefois à la rue Beaubourg pour sa partie entre la rue au Maire et la rue de Montmorency (IIIe).
Lorsque Louis Philippe devient roi des français, le pays connaît des mouvements populaires organisés selon le pouvoir par les "républicains" qui, après avoir soutenu la monarchie s'en écartent du fait de certaines lois contre les vendeurs de journaux, de l'interdiction des associations et des répressions engagées.
Le 9 avril 1834 la Société des Droits de l’Homme et le conseil exécutif des sociétés ouvrières de secours mutuel organisent une manifestation à Lyon. L'émeute fait boule de neige et s'étend rapidement en France et à Paris.
Exemplaire de la fameuse estampe de Daumier appelée par certains contemporains la "Boucherie de la rue Transnonain" (BNF Département Estampes et Photographies)
Des barricades sont dressées ici et là dans les rues dont une rue Transnonain. L'armée est requise par le roi et Thiers afin de s’assurer du contrôle du centre de la capitale et éviter l'insurrection.
C'est dans ce contexte, le 14 avril 1834, tôt le matin, lors du passage d'un détachement militaire, qu' un officier est tué par un coup de feu trés vite identifié comme venant de l'immeuble situé au N° 12 de la rue Transnonain. Les militaires réagissent aussitôt en investissant la maison où logent 34 locataires et en tuant tous ses habitants (sans distinction), souvent pris dans leur sommeil, certains ayant pu néanmoins se cacher ou ayant été blessés. ils étaient pour la plupart artisans, nombreux dans le quartier.
Bien que n'ayant donné aucun ordre dans cette affaire, le général Bugeaud qui commandait les 40 000 hommes destinés à réprimer les émeutes fut appelé, à la suite de cet épisode sanglant, "le boucher de la rue Transnonain".
Cette tuerie aurait pu être oubliée par le temps si Daumier, qui par là affirma son appartenance politique, n'avait pas utilisé cette affaire comme thème de l'une de ses estampes devenue " l'oeuvre majeure de l'histoire de l'estampe du, XIXe siècle". La censure de l'époque fit saisir la pierre et certains exemplaires mais elle ne put empêcher sa diffusion après son exposition dans le passage Véro-Dodat (Ier).
En passant à l'intersection des rues de Montmorency et Beaubourg (IIIe) (côté numéros pairs) et bien qu'il n'y ait pas de plaque pour le rappeler, il est difficile de ne pas penser à ce triste épisode de notre histoire.
Dominique Feutry
(*) La rue s'appela successivement rue de Châlons, rue Trousse Nonain, puis rue Tasse Nonain et enfin rue Transnonain (source Wikipédia).