De droite à gauche : Seybah Dagoma, Députée du IIIe et du Xe, Patrick Bloche, Député des IVe, XIe et XIIe, Dominique Feutry et Gérard Simonet. En présence des assistants parlementaires, dans le fond Samia Adgharouamane, et le preneur de vue Lucas Tidadini (photo VlM)
Le découpage des circonscriptions législatives en 2012 a attribué le Marais, qui n'est pas en soi un secteur administratif, à deux députés qui cumulent pour l'un le IIIe arrondissement et le Xe et pour l'autre les IVe, XIe et une partie du XIIe. Ce sont deux élus du PS, Seybah Dagoma et Patrick Bloche.
Le scrutin uninominal à deux tours (par opposition au scrutin de listes) établit une proximité étroite entre les élus et les citoyens. C'est à ce titre que nous avons souhaité procéder à un échange avec nos députés sur les sujets qui font l'actualité et mobilisent l'attention dans nos quartiers. Nous ne sommes qu'à 16 mois des prochaines législatives, il n'était pas inutile que cette démarche ait lieu pour contribuer, avec nos moyens de communication, à une meilleure connaissance des élus potentiels par les citoyens que nous sommes, et une remontée vers eux des opinions de terrain.
Seyba Dagoma, à ce propos partage notre analyse mais rappelle que le député, même s'il est élu localement, est l'élu de la nation et qu'à ce titre il doit se consacrer à sa tâche qui est le vote des lois de la République. On en convient évidemment mais nous faisons l'observation à Mme Dagoma que les citoyens sont désireux de savoir ce que pensent leurs députés de sujets qui ont localement de l'importance. Il en est ainsi en ce moment du projet de la Mairie de Paris de restructurer les arrondissements et de revoir la répartition des tâches entre préfecture de police et municipalité.
Une question s'imposait dans le contexte actuel : comment se positionnent nos élus dans le clivage de leur groupe politique, entre "frondeurs" et "socio-libéraux". Nous sommes restés un peu sur notre faim : Patrick Bloche se déclare attaché à la majorité à laquelle il appartient et déclare ne pas faire défaut à son groupe quand il s'agit de voter, notamment la prolongation de l'état d'urgence. On en conclut qu'il est légitimiste mais il corrige en se prévalant de ne pas avoir voté l'article 2 de la loi (déchéance de nationalité) car cette disposition heurte son humanisme de gauche. A la question : l'action du Premier Ministre est-elle à vos yeux sans reproches, sa réponse est NON. Seybah Dagoma a semblé partager sa posture.
La discussion a porté ensuite sur la transformation de Paris voulue par la Maire Anne Hidalgo. Nos Députés nous ont quelque peu déçus en reprenant l'argumentaire de la mairie : meilleure représentation, efficacité, économies, justice.... Une rhétorique que nous connaissons bien mais dont aucune des composantes n'est démontrée. Nous nous sommes ouverts de la perplexité qui est la nôtre sur les vraies raisons qui poussent notre Maire à vouloir ces changements. Nous témoignons qu'aux yeux des parisiens ils n'apparaissent en aucune manière comme une priorité eu égard aux problèmes auxquels la Ville de Paris est confrontée, à savoir la pollution, la sécurité et la propreté.
Mme Dagoma a tenu à ajouter : le chômage. Nous avons répondu qu'il y a certes du chômage à Paris mais moins qu'ailleurs et il n'a aucune chance de disparaitre tant que la France dans son ensemble n'aura pas repris le chemin du plein emploi, à l'image d'autres pays de l'OCDE.
Nous sommes convenus de renouveler l'entretien au moment de l'examen du texte de loi qui sera soumis à l'Assemblée Nationale et nous nous réjouissons de leur décision de nous consulter, contrairement à notre Maire qui n'a pas encore estimé nécessaire de le faire (à l'instar des J.O. de 2024 !). Dans cet échange, les commentaires de nos lecteurs seront plus que jamais appréciés.
Le débat s'est poursuivi avec l'arsenal juridique qui permet - on ne permet pas - de lutter contre les incivilités qui affectent la qualité de vie des citoyens : occupation abusive de l'espace public, tapage nocturne, tags, flyers et affichage sauvage. Le montant des amendes étant dérisoire (68 €) nos élus sont convaincus qu'il faut faire évoluer la loi vers des sanctions dissuasives. Il n’était pas inutile que nous le leur rappelions car il faut de l'opiniâtreté de la part des représentants des grandes villes pour convaincre le milieu rural et semi-rural d'augmenter ces montants. Il s'y sont jusqu'à présent refusés ....
La "Rotonde" de La Villette, "Propylée" de Claude-Nicolas Ledoux (1788)
Enfin, M. Patrick Bloche s'est exprimé en tant que président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation pour nous remettre son rapport de septembre 2015 "Liberté de la création, architecture et patrimoine", 500 pages de textes qui relatent les travaux et les auditions de cette commission qui a eu la lourde tâche de réviser les modes de protection du patrimoine qui ont fait florès depuis 80 ans au moins avec les sites protégés loi de 1930, les ZPPAUP, les PSMV (*), les "monuments historiques" et "l'inventaire supplémentaire des monuments historiques" ... sans compter la protection "Ville de Paris" introduite par Bertrand Delanoë en 2001.
Nous avions craint un moment que le pouvoir de décision en matière patrimoniale passe en totalité dans les mains des communes et de leurs maires. Ce n'est pas leur faire injure car leur immense majorité est digne de notre confiance, que d'appréhender le risque pour certains de dérapages dus à leur incompétence ou à la prise illégale d'intérêt. L'actualité nous en fournit trop souvent la démonstration. Patrick Bloche nous a affirmé qu'il était prévu que l’État conserve la main. Un contrôle et une harmonisation des politiques patrimoniales seront maintenus par le pouvoir régalien (Ministère de la Culture ?). Nous en acceptons l'augure et applaudissons à cette nouvelle !
Gérard Simonet
(*) ZPPAUP : Zone de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager
PSMV : plan de sauvegarde et de mise en valeur