Hôtel "Le Compostelle", 31 rue du Roi de Sicile (IVe)
Le gérant de cet hôtel coquet trois étoiles, membre de notre association, parle avec condescendance et dans un langage imagé du phénomène des locations saisonnières. Pour dire d'emblée qu'il lui est reconnaissant de lui fournir des bataillons de clients écœurés par une expérience décevante de ce mode d'hébergement, qui fait couler beaucoup d'encre par ailleurs.
Sa progression selon lui n'est pas dû à son attractivité car il y beaucoup de déception chez ceux qui le pratiquent mais à la croissance très forte du tourisme en général. Quant aux loueurs, Bruno Bertez rappelle que le rendement de la location traditionnelle est de 1 % par an, avec les risques de non-paiement et les difficultés de récupération du bien, alors qu'il atteint 4 à 6% pour les locations meublées courte-durée, sans risques d'aliénation pour le bailleur...
L'hôtel qu'il dirige ne craint pas leur concurrence. L'apparition de nouveaux venus qui se déclarent "résidences hôtelières ou résidences de tourisme" ne lui fait pas peur. Ils échapperont aux normes et contraintes de la profession tant qu'ils seront peu visibles mais dès qu'ils demanderont un "classement" ils subiront d'emblée le poids de la réglementation et des contrôles. Et les charges qui en découlent...
Quant à lui, situé en plein cœur du Marais-sud, dans un immeuble "d'époque", au barycentre des Îles, du musée Pompidou, de l'Hôtel de Ville et de la place des Vosges, il ne cherche pas des clients, il les choisit ! les groupes par exemple sont pour lui "non grata". Il ne se dit pas riche pour autant. Les hôtels ne tirent pas bénéfice de la plus-value foncière constatée à Paris et particulièrement dans le Marais car le bâti n'est pas valorisé par le marché mais par la capitalisation de son rendement locatif, sous contrôle de fait car il est impossible en pratique de résilier un bail commercial ou d'en modifier radicalement le contenu.
Cet entretien nous convainc que l'hôtellerie traditionnelle, parce qu'elle ne souffre pas vraiment de la concurrence des locations saisonnières, ne sera pas l'allié objectif que la mairie de Paris pourrait attendre dans la lutte qu'elle conduit contre une évolution qui menace les grands équilibres sociaux en matière de logement. Il reste qu'il est nécessaire d'être vigilant sur le statut de ce qu'on nomme les "résidences hôtelières ou résidences de tourisme" et du contrôle de leur exploitation pour éviter qu'on ait un jour à affronter un drame résultant de leur défaillance en matière d'hygiène ou de sécurité.
Gérard Simonet
Tout à fait d'accord dans les grandes lignes mais il y a hôtel et hôtel, et toutes les locations saisonnières ne sont pas du même acabit.
Oui c'est l'accroissement du tourisme, la concentration sur certaines saisons et le déficit d'hôtels milieu de gamme qui alimentent l'accroissement de l'offre de location dite saisonnière.
Le meilleur rendement que dans la location traditionnelle est une réalité tangible qui va dans le même sens mais le chiffre de 1% présenté comme une sorte de norme du rendement locatif correspondrait peut être à la situation d'un bailleur bien endetté louant en non meublé, pour la location meublée haut de gamme, disons que l'on peut atteindre 2,5 à 3 % dès lors que l'on n'a pas de frais financiers considérables ni de souci d'amortissement des équipements de court terme.
La location de vacances pour un mois en été d'un petit appartement très bien situé et bien calme, avec mini cuisine et sdb-douche avec une chambre à deux lits superposés pour les enfants et d'un salon avec un grand canapé-lit pour les parents a coûté plus de 2 fois moins cher à un couple d'amis venant visiter Paris que le meilleur prix obtenu l'année précédente
dans un hôtel 3 étoiles, pour 2 chambres conjointes, incontestablement plus agréables mais moins commode pratiquement que cette location d'une résidence principale dans la limite de durée utilisée.
En tous les cas, le vrai pb ce sont les "industriels" stakhanovistes de la location courte durée sans foi ni loi, voire hors la loi ... qui prennent à la lettre l'usus et l'abusus ; les hôtels dignes de ce nom comme le Compostelle font partie du charme de Paris-Paname-ville Lumière ...
Et ce ne sont pas leurs clients qui se complaisent dans le tapage nocturne...ou du petit matin ... Les pèlerins d'autres horizons paraissent effectivement être a contrario plus nuisibles, pour ne pas dire barbar(es) à l'égard des résidents qui aiment leur ville, leur famille, et qui apprécient leur droit au repos.
Rédigé par : TMH | 09 novembre 2019 à 15:58