Les restes - aménagés - d'une fonderie d'or sous une verrière de la rue de Montmorency (IIIe)
L'histoire de cet atelier remonte à 1920, époque où on retrouve à Paris un certain Jean Galmont, français, aventurier, qui s'est fait connaître et apprécier en Guyane au point d'y être aimé comme un père par les noirs et les indiens qui peuplent le pays.
Il est exploitant de mines d'or quand il rentre en France et décide de fondre et affiner l'or qu'il produit lui-même en Guyane. Il installe son atelier au n° 14 de la rue de Montmorency dans le IIIe, au centre d'une cour, dans une construction en briques et verre qu'on peut voir encore, ainsi que l'enseigne "fonderie" sur sa face avant.
Seringueiro et garimpeiro, chercheur d'Eldorado, défenseurs des humbles, épris de justice, aigrefin juste ce qu'il faut pour rester sympathique, cet homme méritait d'être raconté. Blaise Cendrars ne s'y est pas trompé, qui lui a consacré une biographie : "Rhum", la vie aventureuse de Jean Galmot (Grasset, 1930).
Dans le PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais, dont le règlement a plus de dix ans aujourd'hui, cette construction parasite a vocation a être détruite dès qu'elle n'abritera plus d'activité économique. Les occupants actuels n'ont aucune intention de la quitter, mais il n'en reste pas moins qu'elle est frappée d'une sorte d'illégitimité qui pèse sur sa valeur vénale.
C'est le thème que nous avons abordé d'emblée avec Daniel Duché. Sa vision du "patrimoine" va bien au-delà de la démarche qui a présidé à l'élaboration du plan actuel. "On a réduit le patrimoine aux constructions des XVIIe et XVIIIe siècles. Il y a dans le Marais des éléments de patrimoine qui appartiennent au XIX et au XXe siècles" (des immeubles haussmanniens, art nouveau, art déco, en particulier), "et des vestiges d'une activité industrielle qui fait aussi partie de notre patrimoine et dont nous devons conserver la mémoire.
C'est une équipe d'une dizaine d'architectes et architectes voyers, co-financés par l'Etat et la Ville, qui a pour mission d'établir un relevé immeuble par immeuble avec un jugement sur la qualité du bâti, et de formuler des recommandations concernant les éléments parasites tels que hangars, verrières et appentis. Leur traitement sera proposé pour avis à la commission locale du secteur sauvegardé, rétablie par le Préfet de Paris en date du 18 février 2009.
Certains de ces éléments parasites, comme l'ancienne fonderie de Jean Galmont, méritent effectivement qu'on s'y intéresse. D'autres peuvent laisser perplexe, comme cet édicule que nous avons photographié rue Chapon :
L'approche de Daniel Duché ne se limite pas au bâti. Elle est aussi celle d'un urbaniste qui s'intéresse aux transports, à la circulation, au stationnement, à la salubrité, au mobilier urbain et aux conditions d'accessibilité. Le PADD (plan d'aménagement et de développement durable), élément important du PLU (plan local d'urbanisme) de Paris, s'imposera au Marais, dans des conditions qui devront être précisées. Il faut désormais intégrer les énergies renouvelables (panneaux solaires et photo voltaïques, éoliennes) et s'adapter à un mode de vie des habitants qui a changé (garages à vélos, à poussettes, locaux pour le rangement des bacs du tri sélectif ...)
Le paysage de la rue ne sera pas oublié et, notamment, les devantures de commerces qui trop souvent l'appauvrissent. Pour Daniel Duché, la Ville et l'Etat devront se donner les moyens de les gérer avec la rigueur qui prévaut pour l'entretien des façades.
Il est sensible au respect de l'espace public, constatant que les terrasses de bars-restaurants ont une propension excessive à occuper les trottoirs au-delà de l'emprise qui leur est accordée. "Comment peut-on vivre rue du Trésor, et surtout dormir, dans le brouhaha des consommateurs installés en terrasse ?"
Daniel Duché avait trois ans pour présenter son dossier. Il lui en reste deux aujourd'hui. Il affirme de façon péremptoire qu'il respectera l'échéance. Il faudra compter ensuite sur les délais administratifs habituels pour qu'entrent en vigueur les nouvelles dispositions. En attendant, le règlement actuel s'applique. Nous avons signalé à ce propos la situation du hangar LISSAC, qui attend toujours que la Ville applique la loi. Pour notre part, nous avons insisté sur la nécessité de faire "respirer" le Marais. Le PSMV en vigueur en a fait un objectif, en dégageant cours pavées et jardins à l'intérieur des ensembles d'immeubles. Il ne faut pas le perdre de vue, et éviter de densifier des quartiers qui sont les plus peuplés de Paris (source APUR), ville dense parmi les plus denses du monde.
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