Passage de fortune installé lors de la crue de 1910
Les longues chutes de pluie après la neige que nous connaissons actuellement ne manquent pas de nous rappeler le spectre de la crue de 1910 qui a été très médiatisée à l’époque et est donc restée dans la mémoire collective. Il faut dire qu’en ce début de XIXe siècle toutes les conditions ont été réunies pour conduire à cette catastrophe.
Tout d’abord la topographie de la région parisienne avec la Seine et ses affluents (notamment l’Yonne) constitue un terreau favorable. Après un été humide, des chutes de neige et de la pluie au début de l’hiver, des averses abondantes se mettent à tomber sur des sols saturés voire gelés dès la mi-janvier 1910. Le fleuve et ses affluents, les nappes phréatiques, tout déborde alors rapidement sur les quais, les rues, les caves, envahis par l’eau.
La surprise vient surtout de l’ampleur de la crue et de l’inondation de zones éloignées du fleuve comme par exemple près de la Gare Saint-Lazare. Plusieurs arrondissements sont concernés ainsi que des centaines de rues et avenues. Les arches du pont de l’Alma ne sont même plus visibles ! Les perturbations sont alors de tous ordres qu’il s’agisse des transports en commun, du ramassage des ordures, de l’électricité, des égouts, des approvisionnements et des déplacements.
Des passages sont créés comme on le voit sur les photographies de l’époque. Il s’agit de simples planches installées sur des tréteaux mais aussi de passerelles car la crue va durer 45 jours consécutifs ! Les militaires, mais aussi des marins normands et bretons avec des barques sont appelés en renfort. Des secours se mettent en place car nombreux sont ceux qui ont dû être évacués puisque l’on dénombrera 200 000 parisiens sinistrés et 20 000 immeubles inondés le long des 40 km de rues touchées ! Les dégâts sont énormes.
Livraison à domicile durant la crue de 1910
Heureusement toutefois la solidarité a joué à plein en provenance de toute la France et de l’étranger et toute épidémie a pu être évitée.
Des mesures ont été prises à la suite de cette inondation qui rappelait celle de 1658. Il existe dorénavant 4 grands lacs réservoirs artificiels qui régulent le bassin amont de la Seine en écrêtant les crues des affluents de la Seine et vice versa, en cas de forte baisse de débit. Des travaux ont parallèlement été entrepris touchant les quais qui sont plus haut depuis lors, les écluses ont été revues, des parapets ont été construits, le lit du fleuve a été creusé.
Des structures mobiles ont été mises au point mais le risque d’inondation ne peut pas être totalement écarté. Un Plan Prévention du Risque Inondation (PPRI) existe lui aussi, mis en œuvre depuis 1995 dans la perspective d’une éventuelle crue centennale. Ce plan approuvé par l’Etat en 2003 a été révisé en 2007. Des plans des zones à risque ont été établis par arrondissement. Il est possible de savoir quels sont les arrondissements à risque puisque sont distinguées par des couleurs différentes les parties véritablement inondables, celles où le risque ne porte que sur les sous-sols et les caves et celles où l’alimentation électrique peut être fragilisée.
Pour le savoir il suffit de se rendre sur le site « les cartes des zones inondables Paris.fr ». Ainsi le Marais encourt surtout l’inondation en sous-sol et rencontrera des problèmes d’alimentation électrique, sauf si la crue est plus importante que celle de 1910. Les perturbations en matière de transport et d'approvisionnement le toucheront aussi, au même titre que les autres quartiers de Paris.
Il est d’ailleurs conseillé dans le cadre de recommandations qui sont formulées aux habitants de vider les caves des substances qui pourraient provoquer une pollution (bidon d’essence, pots de peinture, …), d’équiper de clapets anti-retour le tout à l’égout des immeubles, de protéger par un cuvelage les sous-sols dans lesquels se trouvent des machineries d’ascenseurs, des chaudières, des tableaux électriques, des surpresseurs pour monter l’eau dans les étages et de ne pas oublier d’avoir à disposition des lampes électriques à piles et des bougies en cas de coupure d’électricité…
Espérons qu’aucune crue aussi spectaculaire ne se produise car ses conséquences seraient fâcheuses.
Dominique Feutry