Filets de protection contre les chutes de pierres sur la façade de l' église Saint-Merri (IVe)
A plusieurs reprises des articles documentés sont parus récemment au sujet de l'entretien du patrimoine religieux de Paris. Il est vrai que les élections municipales incitent à mettre cette question en lumière mais surtout deux associations, SOS Paris et l’Observatoire du Patrimoine Religieux (OPR), ont tiré la sonnette d'alarme concernant les 96 lieux de culte (85 églises) dont la ville est propriétaire qui nécessiteraient selon leur estimation sur 15 ans, 500 millions € pour les restaurer.
Il ne faut pas être grand observateur pour se rendre compte que cet appel repose sur des faits tangibles ne serait-ce que dans notre quartier.
Ainsi l'église Saint Nicolas des Champs (notre article du 13 octobre 2012) mériterait non seulement un sérieux ravalement mais de nombreuses fuites sont à colmater, l’ensemble des verrières qui ont souffert de la tempête de 1998, est à revoir, certaines parties du sol s'enfoncent et doivent être reconsolidées, l'orgue historique est à bout de souffle, une partie du cloitre extérieur subsistant tombe en ruines ...La liste est longue. Certes à l’occasion de l'exposition du Musée Carnavalet « Les couleurs du ciel » des fresques du XVIIe ont été refaites mais d'autres attendent, couvertes de pansements, une restauration d'ampleur....
La façade de l'église Saint Paul-Saint Louis a été magnifiquement refaite (notre article du 14 septembre 2012) de même que l'église Saint-Gervais Saint-Protais (notre article du 6 août 2013 ) mais cela n'est pas suffisant. Ainsi pas très loin du Centre Pompidou, l'église Saint-Merri (IVe) est dans un telle situation que l'organisation internationale non gouvernementale, World Monuments Fund, l'a classée, après avis d’experts éminents, dans sa dernière liste des 100 monuments les plus en danger au monde ! Cela ne grandit pas l’image de Paris qui est la capitale la plus visitée.
Des parties des restes de cloître s'écroulent sur le côté longeant la rue Cunin Gridel (IIIe)
Alors est-ce seulement une question de budget destiné à la restauration et à l’entretien des lieux de culte, si l'on sait que celui-ci a diminué des deux tiers en 10 ans? Est- ce un désintérêt pour notre histoire, notre passé ? A t-on le droit de traiter ainsi le travail des artistes de renom et moins connus qui ont donné le maximum d'eux mêmes pour réaliser ces chefs d’œuvre que nous envient bien des pays ?
Bien sûr qu'il est lourd d’entretenir un tel patrimoine qui comprend non seulement les bâtiments mais aussi le mobilier, les orgues, les installations électriques, les cloches, le chauffage....Le législateur n'imaginait pas en 1905 ce type de conséquence. Plusieurs communes d'ailleurs commencement à détruire des églises non classées trop lourdes à entretenir pour leur budget, gommant souvent aux yeux des habitants un passé récent, ce qui provoque des réactions négatives. D'autres localités se mobilisent pour sauver par tous les moyens ce qui est souvent indissociable du paysage, ne serait-ce que la sonnerie des cloches qui rythme les journées des habitants et donne une vie au village.
A Paris les moyens financiers dont dipose la vlle sont d'une toute autre ampleur et lorsqu'il s'agit de monuments classés les financements ne proviennent pas uniquement de la Mairie. Aujourd'hui cependant l’État est exsangue et les financements ou les subventions sont distribuées avec parcimonie, raison pour laquelle nos élus doivent gérer le budget de la capitale au scalpel en évitant des dépenses somptuaires voire inutiles ou en subventionnant trop d'associations. Certains vont jusqu'à mettre en parallèle des 500 millions € nécessaires pour ces restaurations le coût de la Gaieté Lyrique, 85 millions € ou le surcoût du chantier des Halles ! L'exercice n'est pas simple mais Paris ne peut délaisser ses lieux de culte, y compris dans le Marais, qui ont tous un intérêt architectural, tous un passé riche et célèbre, abritant tous des œuvres d'art connues et des orgues liturgiques remarquables (notre article du 27 novembre 2012) …
Il sera intéressant de suivre les solutions que les candidats comptent apporter s'ils sont élus. Car à part une ré allocation budgétaire décidée par nos édiles et le recours au mécénat, il ne faudra pas attendre grand chose du ministère de la Culture qui a déjà fort à faire sur tout le territoire face à des moyens qui diminuent comme peau de chagrin. Pourtant un plan d'ensemble programmé sur plusieurs années devient urgent et indispensable si nous voulons éviter la misère des lieux de culte parisiens.
Dominique Feutry