Piste cyclable bi-directionnelle rues St Antoine/Rivoli (IVe)
Les travaux de ré-aménagement des rues de Rivoli et St Antoine ont été péniblement vécus par les riverains de cette artère importante du IVe. L'un d'eux nous livre les réflexions du collectif auquel il appartient. Nous en reproduisons le contenu sachant qu'il correspond à une opinion très répandue chez nous sur les transformations de voirie qui ont marqué la mandature d'Anne Hidalgo et dont les contours avaient été dessinés par Bertrand Delanoë et ses Adjoints Europe Ecologie/Les Verts dès 2001.
Une ville est un corps vivant. Quand une opération chirurgicale s'impose, elle débute par un traumatisme. Mais si l'intervention est justifiée, l’organisme repart pour une vie meilleure.
L'Hôtel de Sully, comme son pendant l'Hôtel de Mayenne, tous deux rue St Antoine, ont subi des restaurations salutaires qui ont fait couler beaucoup d'encre et de fiel
Ils sont aujourd'hui peu nombreux ceux qui pensent que ce raisonnement pourrait s'appliquer à Paris, au Marais et à l'axe Rivoli/St Antoine mais il ne faut pas exclure que les stratèges de l'Hôtel de Ville aient une vision éclairée de ce que doivent devenir les déplacements à l'intérieur d'une grande, d'une vieille ville comme Paris où tout, jusqu'aux boulevards des maréchaux, constitue en quelque sorte le centre de l'agglomération du grand Paris.
Ce qu'ils ont décidé de faire est un pari risqué et la population ne sera pas tendre à leur égard si manifestement ils échouent. Mais le pire n'est pas le plus probable. On perçoit une évolution de l'opinion à propos de la nouvelle affectation des berges de la Seine et de la sensation que le trafic automobile a baissé globalement dans Paris.
En attendant, voici comment réagissent beaucoup des parisiens concernés.
GS
Sur le réaménagement de la rue Saint-Antoine, après des mois de travaux, que découvre-t-on ?
En premier lieu, une énorme piste cyclable à double sens, qui se prolonge rue de Rivoli et s’inscrit dans le cadre global de la politique municipale visant à diminuer la circulation automobile. Pour le moment, cette voie monumentale est magnifiquement vide.
Cependant sa création réduit d’autant le reste de l’espace. Dans la rue de Rivoli qui est à sens unique, la piste cyclable est longée par deux étroites voies dédiées à la circulation automobile, dont l’une est exclusivement réservée aux bus, aux taxis et aux véhicules prioritaires. Les taxis de Saint-Paul ont maintenant une station sous-dimensionnée, si bien que leur file d’attente empiète sur la chaussée... Mais surtout, des bordures au relief aplati séparent la partie cyclable de la voie motorisée : ces séparations manquent de visibilité et plusieurs accidents de piétons et de cyclistes sont déjà à déplorer ; il faudrait les supprimer ou les coloriser (la sécurité devant l’emporter sur l’esthétique), de même que les supports de feux débordant sur la chaussée.
Rue Saint-Antoine, la situation est bien plus complexe. Il s’agit d’une artère très commerçante, avec un double sens de circulation automobile. Pour répondre à ces impératifs, la largeur de la chaussée a été divisée en trois : côté impair la double voie cyclable, au milieu de la chaussée une zone consacrée au stationnement des véhicules de livraison et des engins à deux roues, enfin côté pair le peu d’espace restant doit absorber le double flux automobile – ce qui a obligé à supprimer la voie réservée aux bus. De nombreux dysfonctionnements sont apparus immédiatement.
Rue Saint-Antoine (IVe) : file d’attente automobile derrière un arrêt de bus, grand vide de la piste cyclable, et séparation dangereuse entre les deux (Photo VlM/DT)
Lorsqu’un bus est à son arrêt, toute la file est bloquée derrière lui. Il en est de même pour les livraisons, car les livreurs renoncent à traverser avec leurs chariots de marchandises les deux files denses de circulation, et s’incrustent donc devant les magasins côté pair, rajoutant aux embouteillages. Les camionnettes provenant de la rue de Turenne et tournant sur Bastille ont du mal à prendre le virage calculé trop juste : les barres de stationnement pour vélos installées à cet endroit au milieu de la chaussée sont déjà aplaties par des coups de volant malheureux.
Quant aux piétons fort nombreux sur les trottoirs de cette rue commerçante, ils bénéficient des émanations des moteurs tournant au ralenti, et ne traversent qu’à leurs risques et périls : s’ils s’engagent sur un passage piéton, la signalisation ne leur indique pas clairement que des véhicules peuvent surgir de l’autre côté, et beaucoup ont failli être renversés par des voitures arrivant en sens inverse.
Ces problèmes n’existaient pas avant les aménagements. Ils sont le prix à payer pour la satisfaction des seuls usagers de deux roues. Ce sont là quelques réflexions d’habitants du quartier. Espérons que les aménageurs prendront en compte rapidement nos remarques de bon sens, qui visent à améliorer l’usage de Paris. Au-delà du cas de la rue Saint-Antoine, la question de fond de la place respective à accorder dans l’espace parisien aux automobiles, aux vélos et aux piétons mérite d’être posée aux candidats en 2020.
Collectif de riverains de la rue Saint-Antoine