Notre-Dame en travaux. Grue géante et arc-en-ciel de l'espoir ! (Photo Upério)
François Douady, président de l'association XVIe Demain, membre comme nous de l'alliance "Vivre Paris !" et de la Plateforme des associations d'habitants, signe un article pour son journal sur la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame. Nous sommes en parfaite résonance avec son analyse. En voici le contenu :
L'architecte doit fermer sa gueule !
C’est l’ordre intimé par le général Georgelin, président de l’établissement public Notre-Dame de Paris, à Philippe Villeneuve, architecte en chef des monuments historiques responsable de la cathédrale, devant la commission de la culture du Sénat le 13 novembre 2019. Franck Riester, ministre de la Culture, a regretté ces propos et défendu son architecte. Cet accrochage ne doit pas surprendre si l’on se souvient du souhait du Président de la République de « reconstruire Notre-Dame plus belle qu’avant, en cinq ans » pour coïncider avec les JO de 2024.
La flèche a été érigée en 1250, puis démontée au XVIIIe siècle. Viollet-LeDuc l’a reconstruite en 1859 en harmonie avec l’ensemble de son travail sur la cathédrale. Mais depuis la signature en 1964 par la France et 42 autres pays du traité international sur la conservation et la restauration des monuments historiques dit "Charte de Venise", la règle est que « le monument doit être reconstruit dans le dernier état connu ».
Cette première escarmouche entre l’État et la Culture pourrait être suivie par d’autres conflits. On se souvient de cette réponse à un imprudent appel à idées qui proposait une toiture en verre abritant un potager participatif, en oubliant que la cathédrale, appartenant à l’État, est avant tout un lieu de culte confié à l’église catholique par la loi de 1905. Aussi ressortent certaines idées, contestables, contenues dans le rapport de la Mission de la Cité de 2016 établi par Dominique Perrault concernant la cathédrale telle qu’un parvis de verre montrant le sous-sol archéologique et un centre commercial, ainsi qu’un accès par le quai de Seine.
D’autres conflits sont en germe dans la loi du 30 juillet 2019, votée dans l’émotion de l’incendie, pour aller vite. L’établissement public Notre-Dame de Paris, créé le 28 novembre 2019, aura toute autorité pour déroger par ordonnances aux textes protégeant ce monument classé. Cependant, cette loi n’a pas pu écarter l’application des dispositions du code du travail quant aux mesures de dépollution au plomb qui ralentissent les actuels travaux de consolidation. Cette idée bien française qu’à un nouveau problème il faut une loi dérogatoire ad hoc permet de se demander à quoi peuvent bien servir les services du ministère de la Culture.
En effet, il semble qu’une consultation citoyenne décidera du « geste contemporain » pour la restauration de la flèche, puis qu’une autre consultation décidera si les Français veulent une cathédrale restaurée à l’identique ou "plus belle". Un sondage Yougov du 29 avril 2019 réalisé pour le Huffington Post et CNews indique que 54 % des Français sont pour une restauration à l’identique, dont Anne Hidalgo, 21 % ne savent pas et 25 % sont pour un "geste architectural".
François Douady
Président