Le Paris qu'on aime : des fontaines ornementales en état de marche, une voirie entretenue, de grands arbres d’alignement et des façades parisiennes immédiatement reconnaissables. Place Félix Eboué (Paris XIIe) - Fontaine aux Lions (Gabriel Davioud - 1869) (Photo VlM/QD)
Quentin Divernois représente la vague nouvelle des adhérents de "Vivre le Marais, Vivre Paris-centre !" Il n'a que 35 ans et vit dans Paris-centre dans le IIe. Il s'est distingué récemment par sa contribution au lancement du mouvement #saccageparis qui a dénoncé le mobilier urbain de récupération que des idéologue mal inspirés à l'Hôtel de Ville avait commencé à disséminer dans Paris, notamment place de la République.
Il s'est trouvé en résonance avec nous et d'autres défenseurs du cadre de vie, notamment PARISMARAIS.COM le fameux guide de promotion du Marais et du centre historique de Paris qui lui a ouvert ses colonnes, pour une tribune dont nous publions nous aussi le contenu.
TRIBUNE LIBRE : LETTRE AUX AMOUREUX DE PARIS
par Quentin Divernois,
un jeune parisien qui aime sa ville et parle avec son cœur....
Nous Parisiens, souvent râleurs, toujours pressés, l'oublions parfois : Paris est la plus belle ville du monde et nous avons la chance d'y vivre. Elle renferme les plus beaux monuments, (la Tour Eiffel, Notre Dame de Paris, l’Arc de Triomphe, le quartier du Marais ...) des musées incroyables, des théâtres et opéras sublimes, un des centre-ville les mieux préservés d’Europe, qui est encore habité. Nous avons la chance d'y voir une ville épargnée par les guerres. Les jardins nombreux mais de faible superficie sont à la fois essentiels et absolument magnifiques. A la française, pittoresques ou tout simplement modernes, ils dessinent l’ambiance de chaque quartier de la ville.
Mais Paris c’est avant tout une identité, semblable à nulle autre : la ville lumière, le mobilier urbain dessiné par Gabriel Davioud, les perspectives d’Haussmann, les sublimes immeubles 1900 qui s’entremêlent avec les plus anciennes façades des XVIIe et XVIIIe siècles. Paris, ce sont ses rives de Seine, ses places minérales iconiques comme la Place Vendôme mais aussi ses quartiers à forte identité (Montmartre, le Marais, Montparnasse, le Sentier, Belleville…). Ce sont également ses restaurants, ses cafés, ses bistrots, ses rues étroites, irrégulières, ses pavés disjoints et ses platanes centenaires.
On a tous et toutes une raison d’aimer Paris qu’on y vive, qu'on y passe, ou qu’on vienne la visiter. Malgré tous ses défauts. Malheureusement, aujourd’hui, on ne peut faire qu’un seul constat : la ville lumière ne scintille plus autant qu’avant. Ses rues sont chaque jour un peu plus sales : tags, dépôts sauvages et autres incivilités se cumulent et se multiplient. Certes, la faute est à ceux qui salissent mais l'entretien et les sanctions sont défaillants.
Kaléidoscope des horreurs de la Ville
En effet la dégradation actuelle n’est pas seulement le fait de l’incivilité des Parisiens, elle vient aussi d’une équipe municipale qui semble vouloir abimer la ville à dessein.
Depuis 2014, les budgets de la voirie ne permettent plus d’assurer un entretien décent des rues de la capitale : nids de poule, chaussée défoncée, pieds d’arbres à l’abandon, accidents à répétition, service négligé car à la demande et la terrible explosion de la rue de Trévise. Quand on joue avec de tels budgets, les conséquences sont désastreuses.
Il y a également la question du patrimoine que la ville laisse dépérir, quand elle ne le supprime pas carrément : depuis 15 ans, adieu les squares avec fontaines de la Place de la République, adieu les fontaines de la Porte de la Chapelle, adieu le bassin de la Porte d’Italie, adieu le mobilier urbain du second empire… Depuis près de dix ans, la fontaine des Innocents (merveille du XVIe siècle), attend sa restauration et se dégrade à vue d’œil. Les plus belles places parisiennes sont abimées par l’équipe municipale soit par un mobilier indigent soit par des destructions patrimoniales soit par un mauvais goût absolu dicté par une prétendue démocratie participative.
La ville dessine depuis trop longtemps maintenant une esthétique disparate pseudo participative et de « récup » qui détruit l’homogénéité et l’identité de Paris. Embellir la ville n’est plus un objectif de l’équipe municipale. On remplace des grilles en fonte par d’affreuses bordures en bois qui pourrissent à petit feu. On remplace les bancs Davioud à double assise par des blocs de granit ou des bancs « mikado ». Chaque nouveau mobilier a une nouvelle couleur, une nouvelle forme, une durée de vie réduite et surtout il ne signe pas la marque de Paris. Il aurait pu être installé dans n’importe quelle autre ville du monde tant il est impersonnel.
Et que dire de tous les autres problèmes que la municipalité n’arrive plus à gérer : un partage de l’espace public déséquilibré où les piétons sont les grands perdants (panneaux publicitaires géants, terrasses éphémères, plans de circulation incompréhensibles et incohérents, arrêts de bus au milieu de la rue), une dette qui se creuse chaque jour un peu plus sans que l’on n’arrive à comprendre où l’argent disparait si ce n'est pour financer des projets abscons ou démesurés.
Comment également ne pas évoquer les nouvelles nuisances sonores à l’heure où la ville prétend vouloir lutter contre le bruit des voitures et motos ? Les terrasses éphémères sont devenues le cauchemar des familles parisiennes qui n’avaient rien demandé. Un règlement des terrasses éphémères contesté passe en force sans concertation et sa non-application empêche depuis maintenant des semaines des milliers de riverains de dormir convenablement en semaine. Les problèmes de sécurité sont également une gigantesque épine dans le pied de la mairie qui a fait bloc pendant des années contre le projet d’une police municipale et qui depuis a toutes les peines du monde à la mettre en place.
Manifestation contre deux salles de consommation sur les Grands Boulevards
Enfin, la démultiplication des salles de consommation de crack dans des quartiers déjà soumis à de fortes difficultés est la goutte d’or pour beaucoup d’habitants qui aimeraient simplement pouvoir profiter de leurs jardins et laisser leurs enfants aller à l’école seuls sans avoir la boule au ventre. Une nouvelle salle est en projet aux portes du Marais, le quartier le plus touristique de Paris...
Toutes ces faits témoignent d'une incapacité de gestion, de cohérence, de vision prospective et de la volonté de transformer Paris en nuisant à son essence. Bref, à un saccage en règle du cadre visuel et patrimonial des parisiens mais aussi des visiteurs du monde entier qui rêvent tous de Paris. Enfin la municipalité, retranchée dans ses certitudes, n'écoute pas : ni les experts, ni les riverains, ni les familles, ni les classes moyennes. Cette municipalité oppose les citoyens entre eux : les riches contre les pauvres, les valides contre les handicapés, les vélos contre les voitures, les banlieusards contre les parisiens, les jeunes contre les vieux…
Voici pourquoi des milliers de parisiens comme moi, de tous horizons, de tous âges, opinions politiques et horizons culturels qui avons en commun l’amour du beau, de notre patrimoine, appelons au secours. Nous appelons à protester, à manifester devant l’Hôtel de ville de Paris le dimanche 10 octobre 2021 à 15h00. Je vous invite à me rejoindre. Je ne représente pas un lobby, pas un parti, pas une opposition, je représente une certaine idée de ma ville, que j’aime et que je défends de tout mon cœur.
Rendez-vous ce dimanche pour faire entendre votre voix sur l’avenir de Paris. Le Paris qui rayonne et fait rêver le monde entier, et pas celui qui est en train d’être saccagé.