Portail d'entrée de la synagoge
Au 10 de la rue Pavée (IV ème arrondissement) qui tire son nom du fait qu’elle fut la première à être pavée, se dresse une haute et étroite façade qui tranche avec l’aspect des immeubles environnants. De longs pilastres (similaires à ceux que l’on trouve sur un immeuble situé au 10 rue de Bretagne (IIIème arrondisement)) et d’étroites fenêtres l’habillent. Nous sommes devant un bâtiment étonnant, de style art nouveau, de l’architecte Hector Guimard (voir notre reportage du 13 novembre 2011 sur les ouvrages de cet architecte hors du commun à Paris).
L’ensemble est construit tout en longueur mais il est difficile de l’imaginer si l’on n’entre pas à l’intérieur. La largeur du monument est de 5 m et sa longueur de 23 m. Le célèbre architecte a donc dû ruser pour tenir compte de ces contraintes. Lorsque nous sommes face à l’entrée, l’architecture est plutôt sobre et « ondulante », un peu écrasée par l’enclavement dans la rue. C’est ce qui explique aussi sa hauteur (12 m).
La façade "ondulante" de la synagogue
Elevée en 1913, au travers d’une association émanant de plusieurs sociétés israélites orthodoxes d’origine russe et présidée par Joseph Landau (courtier aux Halles), la synagogue de la rue Pavée est de rite ashkénaze. Sa construction devint nécessaire face à l’afflux d’immigrés juifs d’Europe de l’est qui fuyaient la révolution russe mais se trouvaient exclus des structures juives françaises. Elle a été entièrement financée sur fonds privés et par une souscription. Guimard a été choisi par la nièce du fondateur de l’association. Celle-ci deviendra d’ailleurs son épouse, quelques années plus tard. Plusieurs propositions de façades ont dues être faites car l’architecte de la Ville de Paris les rejetait les unes après les autres. Des matériaux modernes tels que la pierre agglomérée creuse et une armature en béton armé ont été utilisés.
Intérieur de la synagogue
L’intérieur où l’espace culte est à l’arrière, l’avant étant occupé par des bureaux et des salles de cours, est formé de deux étages en mezzanines de chaque côté de la travée centrale. Quant à la nef, elle est illuminée par les lumières qui arrivent des verrières du plafond et de la baie vitrée du mur du fond de l’édifice. Guimard a aussi été chargé de dessiner le mobilier (bancs, chandeliers, luminaires, garde-corps en fonte), le dessin des bancs reprend le mouvement de la façade et ils sont ornés du même triangle que celui qui figurait à l’origine au-dessus du porche d’entrée. Il a été remplacé par l’étoile de David lors de la restauration qui a été entreprise après le dynamitage qui s’est produit en 1941 lors de la veillée du Yom Kippour.
Détail d'une mezzanine et du garde-corps
Ce monument classé, ainsi que le mobilier, depuis 1989 est le dernier lieu de culte construit dans le Marais, le seul conçu par Hector Guimard et le seul ne dépendant pas du Consistoire. Malheureusement, il n'est pas signalé devant le monument qu'il est l'oeuvre de ce grand architecte et les visites ne sont possibles que lors des Journées du Patrimoine. Le détour s’impose d'autant plus à cette date.
Dominique Feutry