Métro "Châtelet", place Ste Opportune (Ier), l'une des 66 entrées de métro dont on doit la décoration à Hector Guimard
Hector Guimard, architecte français né en 1867, mort en 1942 à New-York, est représentatif d'un style architectural connu sous le nom d'Art Nouveau. Après la fin de la IIIe République, sur laquelle régna à Paris - et en province - la figure imposante du Baron Haussmann et le style qu'il imposa tant pour les immeubles que pour les voies et perspectives, il semble prendre le contre-pied de la rigueur ambiante, par l'exubérance du décor, la présence de rythmes, de couleurs et d'ornements.
Il n'est pas seul dans son genre. Victor Horta en Belgique et Antoni Gaudi le catalan appartiennent à la même école, que Violet le Duc influença par son enseignement.
Pour lui rendre hommage, nous sommes partis de l'entrée du métro "Châtelet", place Ste Opportune (Ier). Elle date de 1901. Avec celle de la station "Abbesses", c'est l'une des plus belles qu'il ait réalisées. Tout est de lui y compris les inscriptions dont il dessina lui-même la typographie.
En remontant la rue de Rivoli, jusqu'à la rue St Antoine, face à l'espace St Paul, on s'engage dans la rue Pavée. On trouve là au n° 10 un ouvrage très caractéristique de son art : la synagogue construite en 1913 pour une union de communautés israélites ashkénazes, représentative des juifs qui ont immigré massivement d'Europe de l'Est au début du XXème siècle.
La synagogue du 10 rue Pavée (IVe)
L'originalité est dans les lignes verticales, fenêtres étroites et pilastres élancés, qui métaphoriquement élèvent l'âme vers le ciel et font oublier que l'ouvrage disposa, pour son érection, d'une emprise au sol étriquée. On observe sous la marquise, que l'architecte cède à son goût de la décoration : au-dessus de l'étoile de David (qui serait un rajout à la rénovation de l'édifice après la guerre), on devine une série de végétaux sculptés. Le matériau est constitué de pierres creuses sur béton armé. Une audace technologique pour l'époque.
Il n'y a pas profusion d'ouvrages d'Hector Guimard. Aussi, notre flânerie va faire un crochet par le coeur de son oeuvre à Paris. Il suffit pour cela de prendre le bus 72 et de descendre à la Maison de la Radio. Le saint du saint de Guimard est là, à deux pas, 14-17-18 rue Jean de la Fontaine et 8-10-12 rue Agar, dans le XVIe. C'est au 14 qu'on peut admirer le Castel Béranger, sa porte étonnante qui est en soi une composition ornementale et les "hippocampes", fantaisie de l'architecte, piqués ça et là sur les façades.
Façade 10 rue Agar, à gauche et porte d'entrée du "Castel Béranger"
Avec le temps, Guimard évolua vers plus de sobriété. On le retrouve dans le Marais avec un immeuble dont il signe l'architecture au 10 rue de Bretagne (IIIe).Les lignes verticales sont privilégiées, le haut de l'immeuble est traité avec imagination.
On est en 1919, à l'aube du virage vers l'art déco dont on rencontre quelques exemples dans les artères à la périphérie du Marais, tels le 10 rue du Renard, qui a servi de siège au syndicat de l'épicerie.
La rue du Renard (IVe) avec deux immeubles côte à côte au 10 et au 12, illustre le contraste entre "art nouveau" à droite et "art déco" (période 1920 à 1940) à gauche.
Nous vivons dans le Marais au sein d'un univers des XVIIème et XVIIIème siècles où on dénombre quelques touches allogènes : un peu de médiéval avec l'hôtel de Sens, l'immeuble du 3 rue Volta (IIIe) et celui de Nicolas Flamel, 51 rue de Montmorency (IIIe), un peu de renaissance, avec la maison de la famille Jacques Coeur, 40 rue des Archives (IVe), et ses fenêtres à meneaux simples et croisés (si, si ... allez vérifier sur place !), puis de l'art nouveau et de l'art déco et enfin du contemporain dont on ne peut malheureusement pas se réjouir, avec le gymase Michel le Comte (IIIe), la piscine St Merri et la cité des Arts (IVe) pour ne citer que les plus symptomatiques.
Dans ce contexte, c'est une joie de posséder un peu de Guimard. A forte dose, il est probable que son style surchargé, déconcertant et hallucinogène créerait une forme de rejet. Avec deux ouvrages seulement dans le Marais, nous sommes loin de là.
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