Le site inscrit "Cap Corse côte occidentale". Plus de 6.000 ha protégés. Site Angèle Paoli
C'est un tremblement de terre qui vient d'avoir lieu chez les défenseurs du patrimoine français : le Parlement a voté le 24 janvier la suppression de "l'avis conforme" des ABF (Architectes des Bâtiments de France), aux permis de construire et autorisations de travaux dans les "ZPPAUP" (zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, instaurées par la loi du 8 janvier 1993).
Il existe 473 "ZPPAUP" en France. Il s'agit de sites remarquables par la présence de monuments historiques ou la qualité de l'urbanisme et des paysages. Elles ont remplacé la notion antérieure de périmètre de protection de 500 mètres autour d'un monument. Il n'y a pas de "ZPPAUP" à Paris mais deux secteurs sauvegardés (Marais et VIIe arrondissement) et une "protection Ville de Paris" qui couvre 5.000 immeubles.
Le retrait aux ABF du pouvoir d'avis conforme, les prive de leur moyen d'action. Faute de disposer de budgets d'intervention, leur influence sur l'évolution des paysages dépendait de leur pouvoir d'autoriser ou non les travaux et fondait leur autorité.
Les associations françaises du patrimoine et des paysages, autour de leur fédération, demandent au gouvernement "de revenir sur cet amendement qui abroge un siècle d'organisation et de progrès de la protection du patrimoine et des paysages de France".
Nous suivons cette affaire avec attention, parce qu'elle nous touche au coeur mais aussi pour le risque de dérive qu'elle comporte à l'égard des secteurs sauvegardés, comme le Marais et une centaine d'autres en France. Il serait regrettable que des circonstances exceptionnelles qui incitent à dynamiser par tous les moyens la consommation, conduisent à sacrifier les atouts qui font l'attractivité et le succès de notre pays, à savoir son histoire, son architecture, ses paysages, sa culture et son art de vivre.
Mots-clés : ZPPAUP, sites inscrits protégés, sites sauvegardés, avis conforme, ABF, architectes bâtiments de France, cap corse
Post-scriptum du 25 février : on a appris depuis que le conseil constitutionnel, saisi notamment par Yves Dauge, président de la commission nationale des secteurs sauvegardés, sénateur-maire de Chinon, a demandé au gouvernenemt de retirer cet article de loi, considéré non conforme à la constitution, essentiellement pour des raisons de forme. Le danger est donc écarté mais pas supprimé.
Communiqué d'une mise au point de la Députée Laure de la Raudière, rapporteur du texte de loi.
Citation :
Cher Monsieur,
Vous avez souhaité attirer mon attention sur un amendement déposé par mon collègue député Nicolas Perruchot, sur le projet de loi pour « l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés », dont j'ai été le rapporteur. Je tenais à vous apporter les éléments d'information suivants. Je vous laisse le soin, si vous le désirez, de mettre ma réponse sur votre blog : elle est longue car ce sujet mérite d’être précisé clairement.
Cet amendement vise à substituer un avis simple à l’avis conforme des architectes des Bâtiments de France pour l’autorisation de travaux intervenant dans le périmètre des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP).
Comme vous le savez, le code de l’urbanisme prévoit la possibilité de créer des « secteurs sauvegardés » (comme l’Ile Saint-Louis à Paris, le centre d’Aix-en-Provence, etc.) présentant un caractère de nature à justifier la conservation, la restauration et la mise en valeur de tout ou partie d’un ensemble d’immeubles bâtis (art. L. 313-1). L’article L. 313-2 du même code prévoit qu’à compter de la création du secteur sauvegardé, les travaux sont soumis à permis de construire ou à déclaration, après accord de l’architecte des Bâtiments de France (ABF). Ces dispositions sur les secteurs sauvegardés ne sont nullement remises en cause par l’amendement « suppression de l’avis conforme des ABF » qui ne vise que les ZPPAUP.
Parallèlement à la création de « secteurs sauvegardés », le code du patrimoine prévoit une procédure de création, sur proposition du conseil municipal, de zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), autour des monuments historiques et dans les sites à protéger ou à mettre en valeur pour des motifs d’ordre esthétique, historique ou culturel (art. L. 642-1 du code du patrimoine)
La création d’une ZPPAUP fait l’objet d’un contrat entre l’Etat et la municipalité, contrat contenant les règles détaillées à respecter en matière d’urbanisme, contrat validé par l’ABF pour le compte de l’Etat.
L’article L. 642-3 du code de l’urbanisme disposait que les travaux projetés dans ces zones sont soumis à autorisation spéciale, accordée par l’autorité administrative compétente en matière de permis de construire, après avis conforme de l’ABF ; ce même article réserve au ministre compétent le droit d’évoquer tout dossier dont l’ABF ou le préfet de région est saisi.
L'amendement qui a été adopté vient substituer un avis simple à l'avis conforme de l'ABF. L’Assemblée Nationale a estimé qu’un avis simple de l’ABF suffit, étant donné que le règlement de zone fait déjà l’objet d’un contrat validé par l’ABF en amont des projets, lors de la création des ZPPAUP. Le Sénat a confirmé cette position.
Il est important de souligner que la création d'une ZPPAUP ne procède pas d'une décision unilatérale de l'administration mais d'un partenariat entre l'Etat - tout particulièrement les ABF - et les communes.
Avant la création d'une ZPPAUP, un règlement de zone est en effet élaboré conjointement entre l'ABF et le maire.
Ce règlement - qui a force juridique - définit les objectifs et les modalités de la conservation du patrimoine applicables à la zone, en accord avec l’ABF. La création de la ZPPAUP est décidée par le conseil municipal, et cette prise de décision témoigne de l'intérêt qu'il porte à la préservation du patrimoine dans cette zone. Il serait donc incohérent que le conseil municipal vienne délivrer un permis de construire portant atteinte à la préservation du patrimoine. Aussi, un avis simple de l’ABF nous semble suffisant pour veiller au respect du patrimoine qui est l’objet du classement.
Cette mesure ne doit absolument pas s'analyser comme l'abandon d'une prérogative de l'Etat dans le domaine du patrimoine, mais elle correspond à une volonté de moderniser les procédures en matière d'urbanisme.
Ultime garantie de nature à rassurer ceux qui s'inquiètent de cette évolution : le ministre de la Culture pourra être saisi en cas de difficultés et la décision rendue s'imposera alors au maire, comme c'est le cas actuellement.
Enfin, l’ensemble de la procédure reste placée sous le contrôle du juge administratif. En toute logique, un avis négatif de l’ABF, même simple, pèsera lourd dans la décision du juge.
Avec cette mesure, nous avons souhaité renforcer la coopération en amont entre les élus et les architectes des bâtiments de France sur les contrats des ZPPAUP. Cette simplification permettra de promouvoir les projets décidés par les conseils municipaux, tout en s'assurant que les prescriptions nécessaires s'agissant de zones qui doivent être protégées, seront respectées. Cette nouvelle mesure ne me semble donc pas porter atteinte à la préservation de notre patrimoine, auquel, je puis vous l'assurer, je suis particulièrement attachée.
En espérant que ces informations vous permettront de mieux saisir les raisons qui ont motivé l'adoption de cet amendement, je vous prie de recevoir, cher Monsieur, l'expression de mes salutations les meilleures
Laure de La Raudière
Député d'Eure-et-Loir
Fin de citation
Notre commentaire : La rhétorique de Laure de la Raudière et du gouvernement sur ce sujet est bien construite mais la finalité de la mesure est bel et bien d'accélerer le programme d'investissement en évitant un certain nombre de refus venant de l'Architecte des Bâtiments de France, refus qui vise à préserver notre patrimoine paysager. On connait bien l'exposition des maires de France aux diverses influences dont ils sont entourés. On n'est donc pas rassurés.
VlM
Rédigé par : Laure de la Raudière | 05 février 2009 à 11:48
Message reçu de Mme Laure de la Raudière, députée d'Eure et Loir, rapporteur du projet de loi à l'Assemblée Nationale :
Monsieur le Président,
Je vous remercie de votre intervention et comprends votre point de vue. Je vais préparer une note d’explication que j’enverrai à tous les messages reçus, qui font état d’une vive inquiétude.
Soyez bien assuré de la volonté des élus des ZPPAUP [zone de protection patrimoniale des paysages] de préserver leur patrimoine et leur paysage, sinon ils n’auraient jamais décidé de faire une ZPPAUP…
Soyez aussi rassuré sur la volonté de tous les députés de droite et de gauche de protéger le remarquable patrimoine français.
Je voulais aussi vous préciser que l’avis simple de l’ABF est un élément très important en cas de recours par rapport au règlement et spécifications du contrat des ZPPAUP, qui doit être validé par l’Etat (et donc l’ABF) et par le conseil municipal. Je vous enverrai ma note explicative plus détaillée que ce mail.
Bien sincèrement.
Laure de La Raudière
Site Internet : www.la-raudiere.com
Rédigé par : Vivre le Marais ! | 01 février 2009 à 17:37
C'est effectivement étrange ; y a-t-il explications à ce texte ? Il est d'autres moyens pour abréger les délais, par exemple dire que, sans réponse après x mois, il y a accord tacite. N'y aurait-il pas une relation entre ce texte et le problème de l'hôtel Lambert ?
Michel Baillon
Rédigé par : BAILLON Michel | 28 janvier 2009 à 10:48