Municipales : ce que les candidats ne disent pas !
Autre course à l'échalote dans la campagne des municipales à Paris : le logement. Plus bâtisseur que moi, tu meurs !
Nous avons régulièrement attiré l'attention de ceux dont dépend l'avenir de la capitale : notre ville est hyperdense, saturée. La densifier encore est diabolique ! Pardonnez-nous d'utiliser à nouveau l'illustration ci-dessus, mais elle est tellement réaliste !
"Île-de-France Environnement", union régionale des associations franciliennes de l'environnement, reconnue pour la justesse de ses analyses et son impartialité, nous livre sous la signature de Marc Ambroise-Rendu une analyse objective de la situation, basée sur des chiffres que personne ne conteste.
Nous vous suggérons d'en prendre connaissance. Puissent les candidats à la Mairie de Paris et les responsables du "Paris Métropole" qui est à la veille de naitre, en faire leur livre de chevet et un guide pour les décisions à venir.
Gérard Simonet
NB du 1er mars : Le site "sos conso blog Le Monde" (Rafaêle Rivais) a repris cet article et les réactions d'experts qu'il a suscitées pour en faire la synthèse. Ce travail vaut par sa qualité et par le nombre et la valeur des commentaires qui s'y sont ajoutés. Ne manquez pas de le consulter sos conso "Le Monde"
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DEMOGRAPHIE PARISIENNE, par Île-de-France Environnement
Les promesses des candidates soumises à une étude d'impact
Poursuivant sur la lancée de Bertrand Delanoë les deux candidates à sa succession proposent de faire construire à Paris durant leur mandat de 6 ans, c'est-à-dire d'ici à 2020, l'une (Anne Hidalgo) 60.000 logements, l'autre (Nathalie Kosciusko-Morizet) 66.000. Tous les autres candidats et candidates renchérissent, y compris Christophe Najdovski qui parle de 36.000 logements. Toutes et tous invoquent le fait que les personnes désireuses de vivre à Paris sont fort nombreuses et qu'il y a donc - comme le montrent les prix du marché - pénurie de l'offre face à la demande. La notion de droit au logement même dans les territoires les plus encombrés et les plus coûteux est donc repris en compte par la totalité des futurs responsables de la capitale. C'est aujourd'hui le minimum du « politiquement correct ».
Cependant, pas un seul de ces responsables ne se risque (et peut être ne songe) à évaluer l'impact de ses promesses sur la ville et sur ses habitants.
Cette étude d'impact élémentaire nous avons essayé de la faire à partir de divers documents émanant de la mairie de Paris, notamment « Paris en chiffres », 182 p.
Population
En établissant une moyenne entre les propositions d'Hidalgo et de NKM nous retenons l' intention de faire édifier dans Paris 63.000 appartements en 6 ans. Selon les normes franciliennes ils devraient abriter une population nouvelle d'environ 160.000 habitants, probablement composée de ménages actifs avec enfants. En 2020 les résidents parisiens seraient donc au nombre de 2.440.000.
Densité
La densité du Paris bâti (hors Bois de Boulogne Bois de Vincennes et Seine) atteindrait alors 28.000 habitants au kilomètre carré contre 26.300 aujourd'hui. La ville serait ainsi, après Manille et Le Caire, la 3ème métropole mondiale la plus dense et la première capitale européenne selon le même critère (Londres 15.000, Moscou 10.000, Rome et Berlin 7.500).
Constructions
Proposer 63.000 appartements supplémentaires peut se réaliser de deux manières. En remplissant des « dents creuses » dans des quartiers constitués. On peut construire ainsi 1500 logements par an soit 9000 sur la durée de la mandature. La seconde possibilité consiste à aménager de nouveaux îlots ou des quartiers neufs avec leurs équipements. Cela représenterait 54.000 logements. Les deux méthodes conjuguées impliquent la construction - dans des volumes post-haussmanniens, immeubles de 10 à 12 étages (30-36m de haut) avec 5 appartements par étage - de 1260 immeubles, sociaux ou libres, en location ou en copropriété.
Surfaces
Ces édifices leurs dégagements privés et leurs voies de desserte occuperont, avec un COS (coef. d'occupation au sol - NDLR) de 3, environ 150 hectares. Les candidates affirment les trouver en garnissant les rares espaces encore libres, en occupant les bords du périphérique et en construisant sur dalle au-dessus des voies ferrées. Observation : les alentours du périphérique sont les zones les plus polluées de Paris, les dalles ferroviaires sont si coûteuse qu'elles découragent l'édification de logements.
Mobilité
L'accueil de 160.000 nouveaux parisiens implique la présence en ville d'environ 38.000 voitures supplémentaires et d'autant de places de stationnement. Mais aussi de 100.000 va-et- vient quotidiens dans les transports collectifs dont certains sont proches de la saturation aux heures de pointe.
Emploi
Au taux francilien actuel de 70 emplois pour 100 adultes en âge de travailler, la nouvelle population souhaitera trouver 56.000 emplois, lesquels impliquent un demi million de mètres carrés de locaux d'activité, soit une centaine d'immeubles occupant environ 7 hectares.
Equipements scolaires
Les néo Parisiens (de jeunes ménages en majorité) ont évidemment des enfants. Selon les normes d'aujourd'hui leur progéniture exigera 7.800 places en crèches, 15 700 en maternelles, près de 20.000 dans l'enseignement primaire et 27.000 dans le secondaire. Compte tenu de l'occupation des locaux scolaires existant il faudra entreprendre l'édification de 60 crèches, 78 maternelles, 50 écoles élémentaires et une trentaine de collèges et lycées. Soit au total 220 établissements occupant 200.000 mètres carrés et donc une dizaine d'hectares. Mais aussi la fourniture quotidienne de 17.000 repas de plus par les cantines des écoles.
Equipements sportifs
Si on souhaite leur offrir des équipements sportifs aux standards parisiens actuels il faudrait aux 48.000 sportifs pratiquants issus de la nouvelle population 2 stades, 4 terrains d'éducation physique, 16 salles de gymnase et 2 piscines supplémentaires. Soit plus d'un hectare et demi d'espace à équiper.
Déchets
Deux cent tonnes d'ordures ménagères supplémentaires seront à ramasser quotidiennement.
Espaces verts
Si les candidates à la mairie voulaient mettre à la disposition des nouveaux foyers des surfaces d'espaces verts conformes aux normes internationales il faudrait dénicher ou dégager dans le tissu urbain 150 hectares de verdure. L'une (NKM) assure qu'elle trouvera 100 hectares en verdissant les « délaissés », l'autre (Hidalgo) qu'elle végétalisera les toits-terrasses et les murs. Est-ce réaliste... et suffisant ?
Personnel municipal
La Ville de Paris met, en moyenne, un fonctionnaire municipal au service de 456 Parisiens. Si elle veut offrir les mêmes avantages aux nouveaux venus elle sera amenée à engager progressivement 3440 employés supplémentaires. En de fin de mandat la charge financière (au tarif du Smic) sera de 12,4 millions d'euros.
Financement
Sans le prix d'achat du foncier, la construction des logements promis, des bureaux et des équipements publics indispensables (au total près de 300 hectares) nécessitent des investissements privés et publics pouvant être estimés à 9 milliards d'euros sur 6 ans soit 1,5 milliards d'euros par année de mandature.
BILAN
Au regard de cet essai d'étude d'impact on jugera des conséquences concrètes qu'entraine la promesse d'offrir 63.000 nouveaux logements intra muros. En population près de 7% de plus, en bâtiments environ 1600 immeubles d'habitation, de services publics et de tours de bureaux dans le ciel de Paris. En surface 300 hectares, soit 3,5% de la surface bâtie. Mais on voit bien que ces 160.000 personnes, ces 1600 bâtisses et ces 300 hectares sont aux limites du possible. Au-delà du crédible et même du souhaitable estimeront certains.
Marc Ambroise-Rendu
chargé de mission «élections 2014»
IDFE
2 rue du Dessous-des-Berges
75 013 PARIS Tél. 01 45 82 42 34
Les détails de ces évaluations - validées par des urbanistes-architectes et par des spécialistes de l'immobilier parisien - sont à la disposition de ceux qui le souhaitent. Elles sont purement quantitatives. On pourrait tenter aussi d'évaluer l'impact d'un nouveau peuplement sur le tissu parisien et le fonctionnement de la capitale en fonction des catégories socio-professionnelles des nouveaux arrivants. Anne Hidalgo souhaite davantage de "social", NKM veut plutôt des classes moyennes. Les conséquences étant difficilement quantifiables, nous les laissons aux analyse des sociologues urbains
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