Christophe Girard, quai des Célestins (IVe). Rencontre à quatre dans un bar de quartier. Il était accompagné de Roman Abreu. Interview conduite par Gérard Simonet et Monique Bernardon-Fontaine, pour "Vivre le Marais !" (Photo VlM)
Christophe Girard a 58 ans. Il doit sa carrière à sa rencontre en 1976 à Tokyo avec Pierre Bergé et Yves Saint-Laurent. Depuis 1999, il est Directeur de la Stratégie chez LVMH.
A la même époque, il entre en politique chez les Verts où il fait la connaissance de Daniel Cohn-Bendit. En 2001, il rejoint Bertrand Delanoë et entre à la Mairie de Paris comme Maire-Adjoint chargé de la culture. Il rompt ensuite avec les Verts pour prendre l'étiquette du PS. Réélu conseiller de Paris en 2008 sur la liste de Dominique Bertinotti, il se voit contraint de renoncer à sa fonction de Maire-Adjoint de Paris pour prendre la mairie du IVe laissée vacante par la nomination de Mme Bertinotti dans le gouvernement de François Hollande.
Il s'est fait connaitre du grand public pour avoir instauré les "Nuits Blanches" à Paris. Il a écrit des livres et milite pour l'homoparentalité.
Il est désormais candidat à sa propre succession. Il garde toutefois un pied chez LVMH avec un poste à tiers-temps. Il se flatte de n'être pas un politique professionnel et affirme qu'il reprendrait du service dans l'industrie si la fortune ne lui souriait pas aux prochaines élections.
Le personnage est déroutant et attachant à la fois. Pendant la campagne de 2008 on a pu le voir arborant un foulard jaune dans une réunion au Théâtre de la Gare avec ses camarades de liste qui portaient tous un foulard rose. Questionné sur cette coquetterie, il avait déclaré : "le rose, je m'en méfie. Le vert, j'ai déjà donné. Le jaune c'est la couleur du soleil. Je la trouve très belle".
Ses concurrents ne se cachent pas pour rappeler qu'avant sa prise de fonction à la mairie du IVe en 2012, il ne terminait aucun des conseils d'arrondissement qu'il abandonnait avant la fin. Depuis, il affirme qu'il tire une grande satisfaction d'avoir réussi, en deux ans seulement, à régler des problèmes ardus en réunissant dans une même dynamique toutes les directions opérationnelles concernées (urbanisme, propreté, voirie ....). Il cite comme exemple l'espace St Martin/Cloître St Merri, qu'il a réhabilité, ou la circulation rue de Jouy qui posait de graves problèmes de sécurité.
Les habitants ont pourtant délaissé l'arrondissement durant la mandature. On quitte le IVe alors que Paris se peuple à l'image du IIIe, l'autre arrondissement du Marais. Christophe Girard ne pense pas qu'il faille en chercher la raison dans l'agitation qui règne sur un certain nombre de sites tels le carrefour Archives-Ste Croix. Il pointe le fait que la perte d'habitants se concentre sur l'Île St Louis. Il convient que des familles aient pu partir pour des raisons de tranquillité mais il observe qu'il s'en est installé d'autres que l'ambiance existante ne gêne pas.
D'autres dossiers l'attendent : occupation de l'espace public rue des Archives, devenir de la rue Pierre au Lard, désordres de la place Ste Catherine, invasion des affiches et des flyers autour d'Archives/Ste Croix, rue du Trésor (nuisances et percement illicite d'une ouverture sur la façade de la fontaine). Il est trop tôt pour juger de l'efficacité de sa méthode mais il affiche une forte détermination à laquelle on a envie de souscrire.
C'est le cas en particulier de l'école/gymnase/piscine Renard-St Merri. Elle accumule à elle seule toutes les misères du monde : laideur affligeante, occupation de l'espace public qui gène la circulation et le passage des piétons, saleté, tags, déchets et, à l'intérieur, fuites d'eau, dégradation des vestiaires, des douches, au point qu'il a fallu les fermer .... Christophe Girard affirme qu'il est déterminé à réhabiliter l'ensemble. Il ne donne pas de prix mais il laisse entendre qu'il ne faudrait pas lésiner. On cite dans les milieux informés un chiffre compris entre 15 et 20 millions d'€. On sait par expérience que ces évaluations sont toujours dépassées. Est-ce une dépense de 30 millions d'€ qu'il faut envisager ?
Si l'arrondissement était par ailleurs capable de sobriété dans son programme de dépenses, une somme de cette importance, pour effacer le chancre que constitue cet édifice à l'intérieur du secteur sauvegardé du Marais, serait admise par beaucoup. Christophe Girard, de ce point de vue, n'a pas été catégorique. Il renvoie le dossier aux discussions qui doivent intervenir entre les parties concernées : urbanisme, Bâtiments de France, voirie, finances, sans compter le futur Maire de Paris. Peut-on situer cette opération dans le temps ? Aucun échéancier n'a été obtenu de lui à ce stade.
On peut attribuer sa réserve au refus d'un engagement à la légère sur un dossier d'une grande complexité. Ou estimer qu'en deux ans il n'est pas allé très loin dans son analyse et ses études. C'est une des caractéristiques de Christophe Girard : il parle posément, avec une grande fermeté, avec persuasion, mais il vous laisse le soin de conclure à sa place. C'est peut-être du grand art. Chacun jugera.
Gérard Simonet