Mise en garde de la Préfecture de Police
Au fil des années, le Préfet de Police de Paris a dû prendre des arrêtés pour protéger la santé des gens, notamment des plus jeunes, dont on sait qu'ils sont des proies faciles pour les distributeurs de boissons alcooliques.
Une pratique en effet s'est développée, depuis la loi anti-tabac de 2008 qui a poussé les fumeurs hors des lieux recevant du public : le "bar-dehors", à savoir la consommation sur l'espace public.
Ce qui n'était qu'une exception s'est généralisé. C'est aujourd'hui un fléau pour la jeunesse qui se livre à l'intérieur et dans les rues, au "binge drinking", une consommation éfrénée et extrême d'alcool, et pour les moins jeunes qui cèdent à la contagion d'une pratique qui facilite le lien social et leur fait souvent oublier les difficultés de la vie, l'espace d'un moment.
Dans tous les lieux où cette dérive sévit, elle crée des conditions de vie insupportables pour les riverains qui subissent l'agression du bruit et les nuisances résultant de l'alcoolisation : détritus sur la voie, épanchements d'urine, vomis, dégradations diverses du bien public ou privé ....
Au-delà des nuisances, il s’agit un problème majeur de santé publique. Le Directeur Général de la Santé, le Professeur Didier Houssin, soutenu par le Ministre de la Santé, a édité un guide pour les maires de France qui les alerte sur les conséquences du bruit et leur donne des outils pour lutter contre les nuisances sonores.
Sur la consommation d’alcool, l'Institut National de la Veille Sanitaire souligne que la pratique croissante de consommation festive d’alcool par les jeunes devient une cause importante et inquiétante de mortalité et de séquelles graves. Pourtant, à Paris, nous constatons une sorte de banalisation de ces lieux ouverts, comme les berges du canal Saint Martin, ou toutes les nuits des jeunes viennent littéralement se saouler (Le Parisien)
Image de post-beuverie dans un pays du sud, prise "sur le vif" (si on peut dire !) (Photo L'indépendant)
L'action conjuguée de la Mairie de Paris et de la Préfecture de Police vise à conjurer cette tendance. Elles y parviennent généralement mais des poches de résistance leur donnent encore beaucoup de mal. Citons le quartier Oberkampf/Jean-Pierre Timbaut, la Butte aux Cailles, la Villette, l'Odéon, la Montagne Ste Geneviève, les rues Archives/Ste Croix dans le Marais ...
Quand les tentatives de médiation, les interventions des "Pierrots de la Nuit", ont été épuisées, le seul recours est l'application de la loi républicaine, garante de notre volonté de "vivre ensemble". La consommation de toutes sortes de boissons est permise jusqu'à 02h00 du matin dans les bars-restaurants et sur leur terrasses autorisées. Ajoutons qu'un millier d'établissements dans Paris disposent d'une autorisation de nuit (pour 60 seulement dans la couronne).
En dehors de ce cadre, il y a infraction de la part des consommateurs et des débits de boissons. Les sanctions existent : amendes (mais le montant est dérisoire), retrait d'autorisation de terrasse (du ressort de la mairie), avertissement (préfecture), procès-verbal (police d'arrondissement), décisions du tribunal de police et, pour finir, ordonnance de fermeture administrative pour un nombre variable de jours.
Si on se réfère à notre expérience, seule la menace de fermeture a d'effet sur les commerçants de mauvaise foi. On entend pourtant la voix du porte-parole des débitants de boissons, maire putatif et anonyme des noctambules, plaider pour la suppression de ce type de sanction. En revanche de leur côté, les habitants demandent au gouvernement qu'il n'en soit rien car ce serait la voie ouverte à une anarchie nocturne qui ne rendrait service qu'aux tiroirs-caisses des exploitants. Il faut, bien au contraire, systématiser ce recours dont le caractère gradué qu'il a aujourd'hui laisse toutes leurs chances aux exploitants sincères, de corriger leurs comportements.
A ce titre, les arrêtés préfectoraux sont indispensables car ils permettent de caractériser les infractions : consommation de boissons alcooliques en dehors de terrasses régulièrement constituées, donc sur l'espace public, et vente à emporter qui vise celui qui alimente le consommateur.
La décision du Tribunal Administratif d'annuler celui de la Butte au Cailles est une péripétie qu'il nous faut surmonter car elle heurte la raison.
Quant à cette suggestion irresponsable des professionnels de la nuit d'autoriser tous les bars-restaurants à rester ouverts toute la nuit, nous répondons qu'avec 1.000 établissements, Paris est déjà bien lotie et que c'est plutôt dans la couronne, désertique encore de ce point de vue, qu'il faut se pencher, si toutefois on pense que c'est une mesure qui s'impose.
Pour revenir à Paris, ses nuits sont multiples. Ne parler que de consommation d'alcool témoigne d'une indigence de la pensée. Les nuits de Paris sont actives. Avec ses bars-restaurants, ses cabarets, ses théâtres, ses salles de concerts classiques ou pop, ses cinémas, ses séminaires nocturnes, expositions, défilés, réceptions, rencontres autour de la création, sans oublier les 1.000 bars et boites de nuit/discothèques. Paris tient une place de choix qui sait concilier fête et art de vivre.
Ce n'est pas sans raison que Paris est la première destination touristique au monde. Au-delà des distractions, Paris c'est aussi une architecture, une histoire, une culture, sa créativité, son romantisme, son climat, au cœur d'un pays qui est le plus beau du monde.
Voilà ce qu'il faut mettre en valeur aussi à propos de Paris. C'est un équilibre qu'il faut privilégier et ne pas chercher à concurrencer les villes qui se distinguent essentiellement par les beuveries qu'elles hébergent.
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