Magnifique vue du Paris qu'on aime. Au premier plan le Pont St Michel
La Maire de Paris Anne Hidalgo n'a pas fini de surprendre. Qu'elle se lance ou non dans la course à l’Élysée, son nom restera associé à des changements profonds de Paris dont elle gère le sort depuis 2014, et même 2008 en tant que Première adjointe en charge de l'urbanisme.
Ses orientations ne font pas l'unanimité mais la devise de Paris, Fluctuat nec mergitur, s'applique à elle-même puisqu'elle nous a habitués à traverser des tempêtes sans sombrer. Il en est ainsi de la campagne "saleté de Paris" qui a commencé avec les rats et prospéré en 2016-17 pour faire long feu en 2020 au moment des élections qui ont consacré sa victoire. Il en est de même de sa politique de déplacements et de son attitude à l'égard des voitures qui est souvent décriée chez nous mais montrée en exemple à l’étranger.
Alors que critiques et pamphlets à son égard sont légion chez nous, le magazine américain Time dans son édition du 23 septembre 2020 lui rendait hommage en la rangeant parmi les 100 personnes les plus influentes du monde aux côtés de Joe Biden et Ursula von der Leyen. L'ancien vice-président Al Gore lui consacrait quant à lui un texte qui disait d'Anne Hidalgo qu'elle a fait de Paris "un exemple éclatant de la manière dont les villes peuvent mener à bien la transition vers des sociétés plus propres, plus saines et plus prospères".
Elle pourrait donc mettre à profit ce dicton des gens du désert, puisque tout lui a jusque là si bien réussi : "le chien aboie, la caravane passe...". Et faire ce qu'elle et ses alliés communistes et Verts ont décidé sans trop se soucier du qu'en dira-t-on.
Elle a pourtant décidé d'agir autrement. Nous-mêmes et de nombreuses associations du mouvement "Vivre Paris !" avons reçu ces jours-ci des invitations à participer à des réunions de travail sur des sujets importants : l'esthétique de Paris et de son mobilier urbain, la révision du PLU (plan local d'urbanisme) et la préparation d'un nouveau règlement en vue de l'intégration des terrasses éphémères et des autorisations "provisoires" d'occupation de l'espace public.
Mobilier urbain en bois de récupération. Le rejet est large et sans appel !
Nous avons répondu présent parce que c'est notre tradition d'accepter le contact et la discussion mais nous suspectons la Maire et ses alliés de se livrer au jeu de bonneteau démagogique qui consiste à leurrer les parisiens sous prétexte de démocratie participative. Il n'y a aucun doute pour nous : les décisions sont déjà prises et pour certaines mises en musique. Le mobilier urbain et son esthétique se sont insérés insidieusement avec ses bancs en bois de récupération, les terrasses "éphémères" sont incrustées dans le paysage et sont visiblement des ouvrages en dur.
Le PLU sera modifié sans que les foules s'en émeuvent car elles y sont peu sensibles. Il y sera question de logements sociaux et de mixité sociale, des sujets sur lesquels tout le monde est d'accord par définition tant qu'on n'en subit pas les conséquences sur sa vie personnelle. Les implications financières seront passées sous silence car l'argent coule à flots en ce moment : on sait que la mairie de Paris a préempté la vente du bâtiment TATI de Barbès et s’apprête à transformer 60.000 m² de locaux commerciaux vacants en logements. Pour qui et à quel prix ?
Autre question délicate mais qui ne sera pas abordée : Paris souffre d'hyper-densité et d'un manque de respiration. Elle est connue pour être la ville la plus dense d'Europe. Il faudrait donc que la population baisse. Que va-t-on faire des nombreux locaux commerciaux délaissés au profit du télé-travail ? On connait la réponse : des logements, donc des habitants en plus. On cherche désespérément la logique... Existe-t-il d’ailleurs une logique, sauf à changer de discours et dire que Paris va désormais miser sur le tourisme de masse et augmenter dans ce but sa capacité hôtelière ?
Gel des places de stationnement rue de Poitou. Terrasse éphémère 29 rue de Saintonge (IIIe)
On en vient au troisième sujet : la voirie et les terrasses. On sait bien ce que la Maire veut faire : remplacer les places de stationnement, donc les voitures, par de l'espace piétons et des terrasses de bars-restaurants. Les syndicats de l'hôtellerie applaudissent, les associations de riverains protestent. Voici ce qu'on entendait à l'issue de la visioconférence qui s'est tenue le 20 avril : "On a passé une bonne soirée... c'est Olivia Pokski qui en a pris pour son grade ! Tout le monde est vent debout sur cette affaire de terrasses. Bien argumenté par les associations de riverains présentes qui ont fourni un travail de préparation considérable. Ça promet pour la suite... (NDLR : Mme Polski est Maire-adjointe de Paris en charge du commerce)"
Ce constat témoigne de l'inutilité d'organiser un combat singulier entre des débatteurs dont les intérêts sont irréconciliables, dans le seul but de se prévaloir d'une concertation. Anne Hidalgo doit se le tenir pour dit : personne n'est dupe, les citoyens ne sont pas des enfants à qui on fait mine de donner un rôle ; il vaut mieux qu'elle exprime clairement ce qu'elle veut faire en nous ayant écoutés au préalable dans un échange qui peut être informel. Elle se rendra compte que la tentation de rendre perpétuelles les mesures d'exception décidées en raison de la pandémie et les nuisances qui vont avec n'est pas acceptable par les citoyens.
S'agissant des terrasses éphémères, nous avons bien compris qu'elle entend offrir de la place aux piétons en échange des voitures dont la disparition laissera aussi de l'espace à des extensions de terrasses. On ne peut pas être pour ou contre cette mesure dans l'absolu. On peut seulement exiger que le règlement dans ses dispositions essentielles ne donne pas de nouveaux privilèges aux cafés au détriment de la circulation des piétons et de la tranquillité des riverains.
C'est une affaire de curseur. Il nous semble raisonnable d'en confier la responsabilité au Maire d'arrondissement. Il est le mieux à même d'apprécier la qualité des projets présentés et de s'y opposer si nécessaire, comme l'a fait chez nous le Maire Ariel Weil avec la place du Marché Ste Catherine, la terrasse de La Fronde ou celle du Café Charlot. Il lui revient d'apprécier quel équilibre il faut assurer entre les uns et les autres. Il est aussi un élu qui devra le moment venu rendre des comptes à ses électeurs.
GS