Sur "Le Parisien" du 9 août, cette illustration parlante d'une pratique qui est devenue un véritable phénomène de société, au même titre que le télétravail....
A 24 heures d'intervalle, les quotidiens Le Figaro et Le Parisien ont publié deux articles sur l'état des locations touristiques - dites Airbnb - dans la capitale. A l'origine, des déclarations de Ian Brossat, président du groupe communiste à la mairie de Paris et Maire-adjoint à l'Hôtel de Ville, en charge du logement.
Tous deux révèlent une incohérence dans le fait que M. Brossat pavoise sur l'efficacité de sa répression alors que les infractions et les sanctions ont sensiblement baissé ces trois dernières années (3,5 millions d'€ en 2021, 2,5 millions en 2022 et seulement 0,5 millions à fin juillet 2023, selon Le Figaro).
Ian Brossat est habile : si le nombre de dossiers a baissé c'est en raison, nous dit-il en bombant le torse, de l'efficacité de la dissuasion qu'il a mise en place....
On le sait, on peut faire tout dire aux chiffres avec un peu de malice et d'à-plomb !
Mais après tout il a peut-être raison, même si la perception des résidents notamment dans Paris-centre est tout autre. Paris-centre qui détient la palme des amendes en 2022 avec un montant de 877.701 € (c/ 951.100 € en 2021, selon Le Figaro).
En fin de compte l'avalanche de chiffres communiqués, au lieu de nous éclairer sur le phénomène, nous le font paraitre plus obscur. Chacun se réfugie dans l'appréciation personnelle qu'il en a, et son décompte des valises à roulettes dans les immeubles et sur les trottoirs....
Pour mieux comprendre ce qui se passe, apportons une fois encore notre contribution : il faut considérer la typologie des loueurs. Les plus inoffensifs sont ceux dont on a le plus parlé : les propriétaires-occupants qui mettent leur logement sur le marché dans la limite de 120 jours par an. Le plafond pourrait d'ailleurs être réduit car il est difficile de prétendre qu'un logement inoccupé aussi longtemps est une résidence principale. Il ne serait pas choquant de limiter la faculté offerte à 90 jours ; mais on va pas se battre pour cela !
Vient ensuite la catégorie des multi-propriétaires loueurs en meublé. La mairie de Paris a trouvé la parade : comme les logements ont le statut "habitation", il est interdit aux propriétaires de pratiquer la location saisonnière car c'est une activité professionnelle, sauf à demander et obtenir leur conversion en "commercial", ce que la mairie refuse tout simplement en pratique. Cette disposition est tellement bien ficelée que cette catégorie de loueurs ne devrait tout simplement pas exister et c'est probablement là où Ian Brossat réussit le mieux dans sa politique de dissuasion et de répression. Ajoutons que si les habitants ordinaires ont une faible propension à dénoncer des résidents permanents, ils ont moins de scrupules à signaler à la mairie des infractions commises par des loueurs qui en font leur métier.
Il y a enfin un troisième cas de figure dont on n'entend apparemment pas parler : les propriétaires de locaux commerciaux qui les transforment en résidences hôtelières. C'est le cas par exemple de ces grossistes-importateurs qui ont tenu le haut du pavé dans le Marais dans les années 2000 avec des magasins et entrepôts qui occupaient les rez-de-chaussée, les caves et mêmes les étages.
Ces surfaces ont toutes le statut "commercial" hérité de leur activité ancienne. Depuis quelques années on assiste à leur transformation et nombre d'entre elles se convertissent en résidences hôtelières dont le modèle, proche des locations saisonnières, est insuffisamment encadré. Leurs propriétaires n'ont pas de raison de demander le changement de statut. Ils se bornent à déposer des demande d'autorisation de travaux à la direction de l'urbanisme qui les leur accordent généralement sans rechigner.
Il se peut que M. Brossat ait lancé des actions pour mieux contrôler ce type de processus et éviter qu'il y ait là une possibilité de contournement massif des barrières qu'il a construites pour réguler les locations saisonnières mais nous ne les connaissons pas et nous n'en voyons pas trace dans la presse. Qu'il veuille bien nous adresser une mise au point, nous nous ferons un devoir et une joie de la publier.
Gérard Simonet