Il ne s'agit pas d'une fête mais d'une rencontre de travail. La photo réunit dans un établissement du XIe, "l'Homme Bleu", 55 rue Jean-Pierre Timbaud, le Directeur de cabinet adjoint du Préfet de police Matthieu Garrigue-Guyonnaud et son conseiller Luis Fernandez, le Maire du XIe François Vauglin, le Commissaire central de l'arrondissement Fabrice Corsaut, des représentants du collectif "Riverains du XIe" et une délégation de commerçants
Il saute aux yeux aujourd'hui, à la lumière des cas où des tensions sont identifiées, que le règlement des conflits aigus ne peut venir que d'une mobilisation du Préfet de police, du Maire et du Commissaire central de l'arrondissement. L'Hôtel de Ville devrait y prendre sa part mais la municipalité actuelle a choisi, on le sait, avec son "Conseil de la Nuit" que dirige l'Adjoint Frédéric Hocquard, de privilégier sa relation avec les professionnels de la boisson et de la nuit ainsi que les fêtards au détriment de la santé des parisiens et notamment de leur droit au sommeil réparateur.
Une inflexion, on le reconnait cependant, est intervenue depuis quelques semaines avec la décision de ne pas attribuer de subvention d'équipement à un établissement fauteur de troubles (37 rue Quincampoix, article du 8 décembre 2018) mais elle a besoin encore de se consolider dans une attitude plus générale et plus systématique.
L'affaire des "livreurs sauvages à scooters" du XIe qui ont empoisonné la vie des riverains dans ces rues dont on a souvent parlé, notamment Jean-Pierre Timbaud, vit un dénouement qui consacre le succès de cette collaboration multilatérale. Sachant qu'elle peut servir de modèle à d'autres secteurs de Paris, nous sommes heureux de publier et de diffuser le compte-rendu du "comité exécutif", peut-on dire, qui vient de consacrer l'engagement des institutionnels et des acteurs de terrain pour assurer une vie meilleure aux riverains concernés :
Ce comité "in situ" de suivi des nuisances causées par les livreurs de la rue Jean-Pierre Timbaud, dont "Vivre le Marais !" parlé dans son article du 11 janvier 2019 pour rendre compte de condamnations en séries par le tribunal de police avait été demandé par la délégation mixte habitants commerçants lors de la première réunion organisée en préfecture de police le 29 novembre 2018 et accepté sans difficulté par nos interlocuteurs institutionnels
Il s'est réuni le 14 février. Le Maire du XIe, François Vauglin, a ouvert la séance en se félicitant des résultats favorables décrits par les membres de la délégation mixte, eux-mêmes porte-paroles des résidents du quartier (habitants, commerçants) ; il a appelé tous les acteurs à rester vigilants car il s'agit de phénomènes mouvants
Le Directeur adjoint du cabinet du Préfet de police, Matthieu Garrigue-Guyonnaud, a insisté sur la nécessité de consolider ces bons résultats et de maintenir l'effort dans la durée. Il a vivement remercié le Commissaire central du XIe Fabrice Corsaut pour sa démarche sur mesure, concertée et au prix d'un gros travail de proximité au quotidien ; le Directeur a indiqué que la stratégie suivie par le commissaire central du XIe avait vocation à se reproduire dans d'autres arrondissements de la capitale.
Il a également souligné que, dans sa mission de protection des populations, la Préfecture de police devait être à l'écoute des habitants et des commerçants ; il ajouté que les autorités doivent des comptes aux citoyens et que, en ce sens, des réunions comme celle-ci sont tout à fait légitimes.
Le Commissaire Fabrice Corsaut a souligné que pour de multiples raisons (effectifs, législation, ...), il est difficile de procéder aux constations nécessaires à la constitution de dossiers solides en matière de lutte contre les stupéfiants ; c'est la raison pour laquelle l'angle retenu par le commissaire central du XIe a été le registre contraventionnel, plus à même d'éviter le classement sans suites, tandis que les faits du ressort de l'action contre le trafic de stupéfiants sont plus délicats à établir, et davantage encore depuis l'avènement des plateformes électroniques (distribution par scooters) et la montée de la consommation de nouveaux produits stupéfiants, notamment chez certaines couches de la population
Dans l'affaire traitée, le Parquet s'est donc appuyé sur une riche liste d'infractions relevant du niveau de la contravention : bruits gênants par cris et vociférations, émissions de bruits portant atteinte à la tranquillité du voisinage et à la santé, tapages nocturnes, diffusions sonores sur l'espace public, dépôts d'ordures, jets de détritus, déversements de liquides insalubres, crachats sur la voie publique, non respect de l'interdiction de consommation de boissons alcoolisées sur la voie publique, jeux susceptibles de gêner la circulation et d’entraîner des accidents sur la voie publique....
En revanche, maintenant que le niveau contraventionnel a bien fonctionné, et que les perturbateurs ont été condamnés à de lourdes amendes, les prochaines infractions éventuelles relèveraient du niveau délictuel car "l'élément moral" attestant de la volonté de nuire à autrui serait facilement reconnu par le Parquet ; les peines encourues seraient encore plus dissuasives ; et la pénalisation financière accrue pourrait se doubler d'une interdiction de paraître dans les lieux des délits
Nos interlocuteurs institutionnels ont insisté sur l'importance, pour le succès de l'action collective, du travail qui a été accompli en amont en matière de contextualisation et de conviction : ce sont ces efforts concertés entre la population, les commerçants, la mairie, le commissariat, la préfecture, qui ont permis d'aboutir, contrairement à bien d'autres dossiers analogues, souvent classés sans suites.
Approuvé par l'ensemble des participants, le représentant du Préfet de police a regretté que certains thèmes de santé publique aient disparu du discours public notamment la consommation de stupéfiants. Il a insisté sur le fait que nous ne devons pas hésiter à faire appel au 17, mieux à même de cerner rapidement les problématiques et d'organiser les actions correspondantes
De leur côté, les habitants et les commerçants ont souligné la transformation spectaculaire de l'ambiance du quartier. ils ont évoqué le fait qu'après une période un peu dure, qui n'est pas complètement terminée, les résultats ont été rapides, du fait d'une présence régulière des forces de police du commissariat du XIe et d'une action conjuguée des commerçants et des habitants : la quinzaine d'individus qui nous pourrissaient la vie nuit et jour ont pratiquement disparu.
La fermeté affichée de la part des exploitants les plus touchés, bien soutenus par les autres parties prenantes, a fini par avoir raison des plus incontrôlables perturbateurs : ces derniers, une minorité bien identifiée, continuent cependant à se signaler par des insultes et des menaces ; des plaintes seront systématiquement déposées par les victimes de ces agissements
Les autres membres de la bande ont préféré quitter les lieux lorsqu'ils ont compris qu'ils ne pouvaient plus développer leur business avec la même tranquillité qu'auparavant ; il est à noter que des clients de la bande se sont manifestés à plusieurs reprises auprès de certains établissements en demandant où étaient passés leurs fournisseurs habituels et pourquoi on ne voyait plus ces petits jeunes qui leur vendaient d'excellents produits... il leur a été répondu que leur supermarché avait fermé ses portes...
Dans cette perspective, la préfecture de police et la mairie de Paris vont se concerter davantage encore afin d'optimiser dans nos rues la présence de la police nationale et des équipes de la DPSP (police municipale) ; même si les secondes n'ont pas les mêmes compétences que la première, une action mieux coordonnée entre les diverses équipes, notamment la nuit, pourrait conforter l'impact des mesures déjà engagées
Une rencontre aura lieu prochainement entre le collectif Jean-Pierre Timbaud et l'association de débits de boissons Culture-bar-bars dans un esprit constructif de part et d'autre : nous savons que nous ne serons pas toujours d'accord entre nous mais nous sommes convenus de l'intérêt d'un dialogue maîtrisé sur le sujet
Les habitants ont souligné qu'ils ont été fortement déçus par les efforts d'ouverture qu'ils avaient accomplis en direction des organisations professionnelles représentatives (UMIH, SNEG, SYNHORCAT) aussi bien dans le cadre du Conseil de la Nuit qu'à l'occasion du lancement de la "Commission de régulation des débits de boissons" du XIe ; dans la perception du collectif Jean-Pierre Timbaud, ces organisations n'ont tenu aucun des engagements annoncés et aucun retour n'a été effectué en direction des habitants qui en ont pris acte.
Riverains du XIe et Collectif Jean-Pierre Timbaud