Rue des Francs-Bourgeois le dimanche (IIIe-IVe) (Photo VlM)
Le quotidien "Le Parisien" publie le 5 janvier sous la signature des journalistes Eric Le Mitouard et Nicolas Maviel une tribune intéressante sur la population parisienne et son déclin annoncé. Il s'ensuit une série de témoignages et d'explications qui épousent le ressenti général mais deux interrogations essentielles et légitimes sont passées sous silence : y a-t-il vraiment une baisse significative du nombre d'habitants à Paris et, si baisse il y a, est-ce une bonne ou une mauvaise nouvelle ?
Les données qu'on peut consulter sur Internet, font plutôt état d'une stabilité de la population, avec 2 176 243 habitants en 1982, 2 181 371 en 2006, 2 229 621 en 2013 et 2 190 327 en 2016. Le nombre est estimé à 2 209 517 pour 2018 et on table sur 2 206 785 habitants en 2019...
Dire à partir de ces chiffres que Paris se dépeuple semble intempestif. Les statistiques, tout comme les cours de la bourse, évoluent en dents de scie. On peut toujours trouver deux années consécutives avec une baisse sans que ce soit significatif à moyen et long terme. Il est plus convenable de dire que la population est stable globalement à Paris avec une légère tendance à l'effritement ces dernières années.
Démographie et services publics doivent être en harmonie...
Autre statistique qui ne manque pas d'intérêt : on a noté 31 940 naissances à Paris en 2000 et 31 623 naissances en 2008 et 28 266 en 2018. Une légère baisse sur dix huit ans (0,6 % par an), qui témoigne là aussi d'une certaine stabilité.
Localement, l'évolution peut être différente. La baisse touche plus franchement les arrondissements de Paris-centre. Mais dans ce secteur, la présence de visiteurs français et étrangers est particulièrement sensible. Le quotidien "Les Echos" publiait une étude le 16/12/2014 qui faisait état de 47 millions de visiteurs dans l'année à Paris (tous hébergements confondus). Actualisé, ce chiffre se situerait aujourd'hui aux alentours de 60 millions, avec 3,9 nuitées par personnes. Tout calcul fait, ce sont de ce fait 640.000 personnes de plus visibles chaque jour à Paris et le centre en absorbe une part majoritaire avec le Marais, Notre-Dame et les Îles, le musée Picasso, le centre Georges Pompidou...
Tout ce qui est dit autour de ce phénomène est par ailleurs incontestable. Le prix du foncier a fortement augmenté entraînant un forme de gentrification qui pousse à la hausse des prix et à la montée en gamme des biens de consommation.
La location saisonnière y fleurit aussi plus qu'ailleurs du fait de l'attractivité du centre historique de la capitale, et ce n'est pas fini car les locaux d'entreposage des grossistes en maroquinerie et autres locaux a caractère commercial se transforment les uns après les autres en "résidences hôtelières".
Dire qu'il n'y a plus de commerces de bouche ou de détail relève un peu du radotage. Les rues de Bretagne (IIIe) et Rambuteau (IIIe-IVe) en regorgent. Simplement, ce ne sont plus tout à fait les mêmes. Et il n'est pas sûr cependant qu'on ait perdu au change.
Parisiens, est-ce là ce vous souhaitez ?
Enfin devons-nous craindre que Paris perde des habitants alors que c'est la ville la plus dense d'Europe avec près de 22 000 habitants au km², que nous manquons d'espace pour respirer un air déjà trop pollué et que nos services publics, notamment les transport, sont saturés ? On a trop tendance dans les sphères politiques à être schizophrènes sur le sujet. Chacun sait que Paris est trop dense mais Anne Hidalgo s'est engagée à créer 10 000 logements par an et sa rivale de l'époque Nathalie Kosciusko-Morizet avait surenchéri à 11 000 !
Pour désengorger Paris, il faut se réjouir que de nombreuses entreprises s'expatrient à la périphérie notamment dans la petit couronne et que les habitants les suivent en s'installant à proximité. A ce propos il est difficile de comprendre que la Maire de Paris ait soutenu le projet de "Tour Triangle" dans le XVe.
En conclusion, les choses étant ce qu'elles sont, il n'y a pas lieu de céder au pessimisme ambiant mais deux recommandations s'imposent à la Ville et à l'Etat. La première : consolider le dispositif de contrôle des locations touristiques et de leurs plateformes. On se demande à ce propos si Ian Brossat, Maire-adjoint en charge du logement aura le temps de s'en occuper alors qu'il est devenu tête de liste du parti communiste aux élections européennes. La deuxième : le Parlement et la Ville doivent se demander s'il n'est pas temps de se doter de lois ou dispositions qui canalisent le tourisme de masse qui est un danger mortel pour les centres-villes comme le nôtre.
GS
Notes :
D'après l'INSEE, institut en charge du recensement de la population française :
le nombre d'habitants à Paris intra-muros atteignait 2 229 621 personnes (population municipale) en 2013 (dernière étude réalisée). La densité moyenne d'habitants par km² était de 21 153,9.
Entre 2008 et 2013, la population parisienne a augmenté de 0,2 %.
Sur les dernières décennies, la population parisienne a augmenté par rapport à 1999 (2 125 851 habitants à l'époque). Mais elle reste toujours nettement inférieure en nombre à celle recensée en 1968 (2 590 771 habitants).
Les plus forts accroissements de population se constatent dans les 9e, 12e, 13e, 18e, 19e et 20e arrondissements, tandis que les 4e, 7e, 8eet 16e arrondissements voient leur population continuer de diminuer14.
Le nombre d'habitants de Paris en 2018 est de 2 209 517, la population sera de 2 206 785 habitants en 2019. Selon les derniers chiffres officiels il y aurait actuellement 1 147 991 ménages sur le département de Paris. Un total de 28 266 naissances l'an dernier, et un total de 13 982 décès sur l'année.